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Le sionisme, une idéologie coloniale ? (par Ana Minski)

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Suite aux crimes commis par le Hamas le 7 octobre 2023, responsable du massacre de 1 400 Israéliens en une seule journée, et suite aux « représailles » de l’État d’Israël, on nous demande régulièrement de prendre position sur la question du conflit israélo-palestinien, c’est-à-dire de soutenir ou dénoncer le sionisme. Ce qui implique de ne pas s’abandonner à l’émotion, de se distancer et de questionner l’histoire d’Israël et de la Palestine, du sionisme, des Juifs et du judaïsme, de l’OLP, du Hamas, etc. Précisons d’emblée que nous condamnons les crimes du Hamas et les crimes de l’État israélien. Nous rappelons qu’aucun crime de guerre ne doit justifier un autre crime de guerre, mais il importe toutefois de le situer dans son contexte véridique.

I. Brève histoire d’un conflit

Avant Israël

En 1880, la Palestine est une province de l’Empire ottoman depuis 1516. Les Juifs ne représentent alors que 0,8 % de la population totale de l’Empire ottoman. L’Europe et l’Amérique comptaient quant à eux près de treize millions de Juifs sur leur territoire. Les Juifs de l’Empire ottoman étaient des Romaniotes (juifs de culture grecque1) ou des juifs de langue et culture arabe2. En 1492, l’Empire ottoman accueille les Juifs séfarades, issus de la Péninsule ibérique, chassés d’Espagne et du Portugal lors de la Reconquista. Durant quatre siècles, la cohabitation entre juifs, chrétiens et musulmans a été relativement harmonieuse3. La judéophobie était bien plus présente chez les chrétiens que chez les musulmans.

En Palestine, la population juive représentait 3 % de la population et se divisait en Juifs Séfarades, issus de la Péninsule ibérique, Romaniotes, Mizrahims – Juifs du Moyen-Orient, d’Afrique du Nord, du Caucase, d’Asie centrale et de l’Inde4 –, et Ashkénazes, Juifs européens.

Une douzaine de groupes sionistes, fondés en 1882 et 1883, se réunissent au congrès de Kattowitz (Katowice), en Pologne prussienne, en 1884, pour former les « Amants de Sion »5, à tendance laïcisante. Ils seront dans la « dépendance effective d’Edmond de Rothschild, qui a pris en charge la colonisation de la Palestine6 ». Ce dernier achète des terres et finance le premier établissement de juifs à Rishon LeZion. En cette fin de XIXe siècle, beaucoup de Juifs Ashkénazes partaient en Palestine, mais n’y restaient pas. La terre palestinienne leur paraissant trop rude, ils lui préféraient les États-Unis ou l’Europe.

En 1908, l’antisémitisme des chrétiens – antisémitisme, historiquement, le plus virulent – , était bien plus important que l’antisémitisme musulman7. Avant la Première Guerre mondiale, la population arabe de la Palestine pouvait ressentir de l’inquiétude face à l’immigration de Juifs européens, mais pas d’animosité.

L’Empire ottoman, méfiant vis-à-vis des différentes prétentions des impérialismes européens, notamment britannique, sur la Palestine, décide cependant de restreindre la migration juive et diffuse la note consulaire suivante :

« Le gouvernement ottoman informe tous les Juifs désireux d’immigrer en Turquie qu’ils ne sont pas autorisés à s’installer en Palestine. Ils peuvent immigrer dans les autres provinces de l’Empire et s’y installer où bon leur semble, à condition qu’ils deviennent des sujets ottomans et acceptent de se soumettre aux lois de l’Empire8. »

Cependant, l’immigration illégale se poursuivit. En 1914, les Juifs de Palestine représentaient 8 % de la population9.

Le sionisme 

Le sionisme a été théorisé par les Ashkénazes, Juifs d’Europe de l’Est, suite aux pogroms10 dont de nombreux juifs ont été victimes après l’assassinat du Tsar Alexandre II en Russie, en 1881.

Le sionisme vise à créer un État juif afin d’avoir un pays et protéger les juifs contre l’antisémitisme croissant dans les pays de l’Est de l’Europe qui, de 1918 à 1921, a fait plus de 100 000 victimes juives en Ukraine et en Biélorussie. Cette vague d’antisémitisme accompagne les mouvements nationaux de l’Est de l’Europe : Russie, empire Austro-Hongrois, Prusse. Les nationalismes orientaux se fondent sur trois piliers : une langue commune, une culture, une religion. C’est sur cette base que le sionisme sera théorisé : une langue, l’hébreu moderne11 ; un État-nation, la Palestine12 ; une religion, le judaïsme13.

Théodor Herzl, autrichien de culture allemande, sera un des principaux porte-parole de ce nationalisme et participera à la création, en 1897, de l’Organisation sioniste mondiale, à l’origine de la création de l’État d’Israël.

À ses débuts, le sionisme, projet porté par des Juifs socialistes et laïcs14, était peu soutenu. La plupart des Juifs préféraient migrer aux États-Unis, rester dans leur pays d’origine ou, tout simplement, ne souhaitaient pas mêler politique et croyance en Dieu.

L’organisation sioniste était mal accueillie par les religieux orthodoxes, certains d’entre eux allèrent jusqu’à dénoncer aux autorités polonaises ou russes des sionistes15. La création d’un État juif était interdite par le Talmud, l’exil étant une punition divine. Pour tenter de s’allier les religieux, les sionistes ont intégré le judaïsme en s’appuyant sur la bible hébraïque et justifier ainsi la création d’Israël en Palestine. Rappelons qu’au départ, les sionistes envisageaient plutôt l’Argentine ou l’Ouganda.

Les juifs religieux d’Allemagne restaient très opposés au sionisme qui, selon eux, menaçait le judaïsme. Crainte qui n’était pas sans fondement, le sionisme originel préconisant la naissance d’un Juif nouveau, « d’un homme radicalement neuf ayant rompu avec le passé juif religieux ‘‘anachronique’’, il y avait même un élément que certains pourraient considérer comme reprenant certains stéréotypes antisémites, puisqu’il n’est pas rare de trouver, dans les textes des pères du sionisme une condamnation méprisante des caractéristiques du Juif de l’exil : veulerie, soumission à sa société d’accueil et à ses normes, manque de fierté, renoncement à soi…16 »

La concordance des intérêts britanniques et sionistes

Theodore Herzl est avant tout un Européen qui a grandi dans la culture impérialiste allemande. Il n’a aucun lien concret avec la Palestine et la culture des peuples sémitiques du Proche-Orient lui est totalement étrangère. C’est pour ces raisons qu’il écrira en 1896 : « Pour l’Europe, nous constituerions là-bas un morceau du rempart contre l’Asie, nous serions la sentinelle avancée de la civilisation contre la barbarie. Nous demeurerions, comme État neutre, en rapports constants avec toute l’Europe, qui devrait garantir notre existence17. »

Tous les sionistes sont imprégnés des cultures de l’Europe de l’Est. Ben Gourion, né David Grün, d’origine polonaise et président de l’État d’Israël en 1948, avouera dans un courrier privé de 1925 : « Je ne suis pas partisan d’une fédération arabo-hébraïque […]. Nous sommes l’Europe, non seulement ses disciples, mais aussi les créateurs de la civilisation européenne. Qu’avons-nous à voir avec “l’Orient” ? Tout ce qu’il y a d’oriental est, de toute façon, appelé à tomber en désuétude18. »

Le projet sioniste est, dès le départ, une entreprise consciente de colonisation qui s’enorgueillit d’apporter la civilisation européenne au Proche-Orient. Ce projet de colonisation est également celui de la France et de la Grande-Bretagne.

Au début du XXe siècle, la France et la Grande-Bretagne cherchent à se partager le Moyen-Orient : Syrie, Liban et nord du Moyen-Orient pour la France ; Irak, Jordanie, Palestine, Sud du Moyen-Orient pour l’empire britannique. C’est à ces fins que l’Empire britannique, intéressé par la Palestine du fait de la route des Indes et du canal de Suez, monte la population arabe contre l’Empire ottoman en lui promettant une grande nation arabe : la Grande-Syrie dans laquelle serait intégrée la Palestine19.

En mai 1916, les accords secrets Sykes-Picot, signés entre la France et l’Angleterre, prévoient le découpage de l’Empire ottoman à la fin de la guerre au profit des puissances européennes.

En novembre 1917, la Déclaration de Lord Balfour, évangéliste antisémite notoire et secrétaire d’État britannique aux affaires étrangères, est publiée dans le Times. Cette déclaration, qui se présente sous la forme d’une lettre ouverte adressée à Lord Rothschild, assure la communauté sioniste que la couronne britannique est en faveur de l’établissement d’un foyer national pour le peuple juif en Palestine. Ce « foyer national20 » ne devrait pas, pour autant, porter atteinte aux « droits civiques et religieux des collectivités non juives existant en Palestine21 ».

L’empire britannique offre donc une région constituée à 95 % d’Arabes, musulmans ou chrétiens – une région qui ne lui appartient pas –, à des citoyens européens qu’il ne désire pas garder sur son propre territoire.

Le Lord Edwin Montagu, unique Juif au sein du cabinet britannique, dans son Memorandum sur l’antisémitisme du gouvernement britannique actuel, s’oppose à la Déclaration Balfour. Il affirme être citoyen britannique avant d’être Juif, et rappelle que la Palestine est une région déjà peuplée22.

Notons le double jeu britannique qui promet d’un côté un foyer national israélien et de l’autre une indépendance arabe.

En 1919, la Communauté internationale se constitue en Société Des Nations (SDN), dominée par la France et le Royaume-Uni. En 1922, la SDN accorde un mandat au Royaume-Uni pour administrer la Palestine. Comme l’indique l’article 22 du traité de la Société Des Nations, le mandat est une nouvelle forme de protectorat puisqu’il vise à gouverner « des peuples non encore capables de se diriger eux-mêmes » et participe d’« une mission sacrée de civilisation23 ». La SDN confie ce qui reste de l’Empire ottoman aux Européens. La Palestine devient un mandat international confié aux Britanniques, bafouant ainsi le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Le mandat pour la Palestine, inspiré de la Déclaration Balfour, reconnaît « des liens historiques du peuple juif avec la Palestine et des raisons de la reconstitution de son foyer national en ce pays24 ». Le mandat stipule que « l’Administration de la Palestine facilitera l’immigration juive25 » et « encouragera l’établissement intensif des Juifs sur les terres du pays, y compris les domaines de l’État et les terres

incultes inutilisées pour les services publics26. » La SDN accorde un primat à l’immigration juive par rapport à la population locale et au mépris du premier Congrès arabe palestinien qui s’était réuni du 27 janvier au 10 février 1919, avec 27 délégués de la Société islamo-chrétienne de toute la Palestine et qui exprime clairement le refus catégorique de tout mandat et exige l’indépendance de la « nation Palestinienne ».

L’enjeu de la Palestine est un enjeu majeur pour les puissances européennes. Aussi, pour accéder à ces terres, le soutien de la communauté mondiale sioniste n’était pas négligeable.

La Déclaration Balfour, et son application grâce au mandat britannique, sera un tournant dans les relations entre sionistes et Palestiniens. La migration des Juifs dans les communautés présentes en Palestine avant 1948, n’était plus une simple migration au sein d’une Palestine plurielle mais s’intégrait dans un projet colonial d’État racial majoritaire : « La démocratie est notre roc et le seul fondement de notre croissance. Mais nous devons tenir compte d’un principe supérieur à ceux de la démocratie : la construction d’Eretz-Israël par le peuple juif27 » . Il est remarquable que, jusqu’à la Déclaration Balfour de 1917, l’antisionisme était surtout majoritaire dans toutes les communautés juives du monde et qu’il apparaît dans le monde arabe à la suite de la Déclaration28.

La création d’Israël

« Le système d’acquisition des sols pour les Juifs a incontestablement eu pour effet de nous créer des ennemis dans les rangs des Arabes. Le sol, qui est aujourd’hui remis entre les mains de Juifs, a été acquis aux dépens des Arabes. Les vendeurs étaient rarement de petits paysans. Le fellah est attaché à sa terre, et ne souhaite pas s’en séparer. Le plus souvent, nous avons acheté le terrain aux grands propriétaires, aux effendis […] mais si les employés et les propriétaires des sols sont des Juifs, qui exproprient totalement les Arabes, la question se pose : va-t-on déposséder un demi-million de personnes ?29 »

Les premiers affrontements entre Juifs et Arabes ont lieu en 1920 lors du pèlerinage musulman du Nabi Musa (Moïse)30 à Jérusalem. Cette fête religieuse draine essentiellement des populations musulmanes palestiniennes et ne concerne pas les musulmans d’autres régions. Selon « le rapport de la commission d’enquête, elle [l’émeute] est due à des accès de violence des deux côtés ; des Juifs armés s’en prennent à des paysans arabes, tandis que la foule arabe essaye par ailleurs de libérer des prisonniers arrêtés par les Britanniques. On accuse aussi les éléments arabes de la police de s’en prendre à la population juive. De nombreux actes de pillage sont enregistrés. La loi martiale est proclamée dans l’après-midi31. »

Du coté des Juifs, il y aura 5 tués, 18 blessés graves et 195 blessés légers, du côté des Arabes 4 tués, 1 blessé grave et 20 blessés légers. Mais ce « chiffre officiel est certainement loin de la réalité, de nombreux musulmans se faisant soigner par leurs familles32. »

Les émeutes de Jérusalem poussent les Juifs à développer leur propre organisation de défense : la Haganah.

En 1929, à Hébron33, des Arabes tuent environ 70 Juifs, en blessent une cinquantaine et pillent des maisons et des synagogues. Les survivants juifs sont au nombre de 435, dont certains grâce à l’intervention des voisins arabes. Ils sont évacués par les autorités britanniques les jours qui suivent.

En 1931, la scission de la Haganah ( « Défense » ), qui était contrôlée par des membres sionistes plutôt à gauche, conduit à la création de l’Irgoun (« l’Organisation »), groupe paramilitaire et terroriste qui commettra des attentats sanglants contre les Britanniques et les Arabes entre 1931 et 194834. L’un des chefs principaux de l’Irgoun, Vladimir Jabotinsky sera à l’origine du sionisme révisionniste dont le secrétaire était le père de Netanyahou.

Vladimir Jabotinsky (1880 – 1940), originaire d’Odessa, fondateur de La Légion juive qui combattra aux côtés du Royaume-Uni contre l’Empire Ottoman, entretenait, dans les années 1930, des relations cordiales avec des régimes dictatoriaux, voire antisémites, comme les régimes polonais ou italien35. En 1923, il écrira, dans la Muraille d’Acier : « Les Arabes de Palestine n’accepteront jamais la transformation de la Palestine arabe en un pays à majorité juive. […] Que le lecteur passe en revue tous les exemples de colonisation dans d’autres contrées. Il n’en trouvera pas un seul où elle se soit faite avec l’accord des indigènes36 ». Il fonde, en 1925, L’union mondiale des sionistes révisionnistes qui appelle à la création d’un État juif comprenant la Palestine mandataire et la Jordanie actuelle37.

Menahem Begin (1913 – 1992), originaire de Biélorussie, sera commandant de l’Irgoun en 1943 et deviendra Premier ministre d’Israël de 1977 à 1983, renforçant ainsi l’idéologie du sionisme révisionniste en Israël.

En 1933, l’Accord Haavara signé entre les sionistes, sous les ordres de l’Agence juive, et les nazis, a été conçu pour faciliter l’émigration des Juifs allemands vers la Palestine. Accord contre lequel s’est opposé Jabotinsky.

En 1939, la Haganah et l’Irgoun décident de soutenir le Royaume-Uni face à l’Allemagne nazie, suscitant une nouvelle dissidence, celle du Lehi (« Combattants pour la liberté d’Israël »), groupe paramilitaire qui commettra plusieurs attentats contre les Britanniques et les Arabes entre 1940 et 1948.

Entre 1936 et 1939, la population arabe palestinienne, majoritairement paysanne, entre en rébellion contre les autorités britanniques et en conflit avec la communauté juive lors de la grande révolte arabe de Palestine qui se solde par plus de 5 000 morts Arabes, 300 Juifs et 262 Britanniques38. La plupart des leaders nationalistes palestiniens ayant participé à la révolte se réfugient dans les pays arabes voisins. Les élites urbaines, loyales à l’Empire ottoman, portaient le tarbouche. Mais, suite au massacre des années 36-39, le Haut comité arabe demande à la population de porter le keffieh, valorisant le rôle de la paysannerie dans la création de l’identité nationale palestinienne39.

C’est au cours des soulèvements arabes que l’Irgoun organisera différents attentats qui ont fait environ 250 victimes parmi les Arabes40. En 1938, David Raziel prend la direction de l’Irgoun et décide d’attaquer les Arabes pour venger la condamnation à mort d’un Juif par l’État juif :

« Le 4 juillet, une bombe de l’Irgoun dans un autobus arabe à Jérusalem fait 4 morts tandis qu’un Arabe est assassiné sur la route entre Jaffa et Tel-Aviv. Le lendemain, 2 Juifs sont tués dans la vieille ville de Jérusalem. Le 6 juillet, l’Irgoun lance des bombes dans le marché arabe de

Haïfa, faisant 21 morts et 92 blessés arabes – et par la même occasion 6 morts et 14 blessés juifs, puisque dans l’affolement provoqué par l’explosion, les Arabes s’en prennent aux passants juifs et que la police tire aussi sur ces derniers, qui répliquent. Dans les jours qui suivent, les assassinats se succèdent des deux côtés (du 4 au 15 juillet, les représailles font 45 morts et 165 blessés arabes contre 15 morts et 82 blessés juifs). Le pire se produit à la fin du mois. L’Irgoun pose une bombe dans un marché de Haïfa qui fait 53 morts arabes, et dans les heures qui suivent 4 Juifs sont assassinés. Le bilan des représailles allant du 4 au 27 juillet se monte alors à 100 morts et 206 blessés arabes pour 27 morts et 64 blessés juifs.41 »

Cette vague de violence juive pousse le reste du pays à la révolte.

En 1939, face aux violences qui se succèdent en Palestine, les Britanniques modifient leur politique en Palestine. En plein nazisme, ils limitent la migration juive en Palestine et installent des camps de réfugiés à Chypre qui rassembleront, en 1948, 40 000 Juifs. Ils stoppent le transfert de terres arabes à des Juifs et promettent la création d’un État unitaire dans les dix ans, dans lequel Juifs et Arabes partageront un gouvernement qui permettrait de préserver les intérêts de chaque communauté. Cette proposition est rejetée par la communauté juive et ses forces paramilitaires, qui se lancent à leur tour dans une révolte générale.

En 1945, l’ONU, qui remplace la Société Des Nations, crée le Comité spécial des Nations unies sur la Palestine (UNSCOP) et envoie 47 membres en Palestine pour envisager soit la création de deux États, soit un État fédéral unique de Palestine où vivraient en harmonie les chrétiens, les juifs et les musulmans.

Le plan de partage en deux États sera voté en deuxième vote, et suite aux pressions, notamment envers le gouvernement britannique, du gouvernement américain qui appelle à l’ouverture de la Palestine à l’immigration juive42. Ce plan de partage sera rejeté par les pays arabes et les sionistes révisionnistes qui souhaitent un État juif de la mer au Jourdain. Cependant, ce plan sera finalement plus avantageux pour les Juifs que celui initialement prévu par les émissaires. Le découpage du territoire se fera selon les régions où les Juifs sont présents. Ce partage accordera au futur État d’Israël 60 % du territoire palestinien où vivent 45 à 50 % d’Arabes. En 1945, dans le futur État juif il y avait 497 000 arabes (sédentaires et bédouins), soit 45 et 50 % de la population. Pour remédier à la présence des Arabes sur le territoire accordé aux sionistes, les Britanniques ont envisagé un transfert des populations arabes43. Quant à Jérusalem, elle est déclarée ville internationale, afin de mettre tous les lieux saints sous tutelle internationale. Autre fait important, 92 % des propriétés de la Palestine mandataire sont arabes. C’est en toute logique que les Palestiniens refusent le partage qui a été voté par les anciennes puissances coloniales contre l’avis des populations majoritaires locales :

« Aucun des 33 pays à avoir approuvé le plan de partage n’appartient au monde récemment décolonisé44. »

Le plan de partage de la Palestine ne satisfait pas plus les sionistes révisionnistes qui souhaitent un grand État juif comprenant l’État d’Israël actuel, le territoire palestinien et la Jordanie. En 1946, c’est l’attentat de l’Hôtel King David par les terroristes juifs de L’Irgoun et du groupe Stern. Cet attentat, mené contre les britanniques, causera la mort de 91 personnes de plusieurs nationalités.

Le vote du plan de partage marque la fin du mandat britannique sur la Palestine et la création de l’État israélien en mai 1948. Commence alors un cycle d’attentats et de représailles, d’attaques et d’embuscades. Le nombre de victimes recensées par la police pour la période du 30 novembre 1947 au 3 avril 1948 sera de 959 morts du côté arabe, 875 du côté juif45.

Entre le 2 et le 20 avril 1948, la Haganah mène l’opération militaire Nashon. Le chef de la Haganah, Yisrael Galili, déclare aux officiers en formation, au début d’avril 1948, que les frontières du plan de partage n’existent plus et que la force fixera des frontières définitives (à ce jour, Israël n’a toujours pas de frontières officielles). L’opération Nashon est une guerre totale destinée non seulement à sauver la population juive (qui représente l’avenir de l’ensemble du peuple juif), mais aussi à briser la volonté arabe, à instaurer un territoire exclusivement juif dans l’esprit d’un Lebenstraum. Cependant, un clivage se fait jour entre ceux qui veulent réaliser immédiatement la conquête de toute la Palestine mandataire, et au-delà, et ceux qui, comme Ben Gourion, envisagent une progression par étapes en fonction des rapports de force et de la consolidation de la position précédemment acquise.

Le 17 septembre 1948, à Jérusalem, le comte suédois Folke Bernadotte, médiateur de l’ONU pour la Palestine, sera assassiné par les sionistes46.

Le 10 avril, ordre est donné d’anéantir tous les villages arabes capturés. Le 11 avril, le Palmah (une des forces paramilitaires juives) s’empare du village voisin de Qaluniya. Les soldats ont pour consigne de tuer tous les combattants ; les prisonniers sont immédiatement exécutés. À Deir Yassin, la plupart des prisonniers, dont des femmes et des enfants, sont exécutés et certains rapports britanniques évoquent des viols. Les maisons sont systématiquement pillées, « les prisonnières survivantes ainsi que quelques vieillards et enfants mâles (les adultes ont tous été tués) sont emmenés dans trois camions, puis exhibés dans les quartiers juifs de Jérusalem47. »

Ces crimes provoquent l’exil de nombreux Arabes.

Le 27 avril 1948, l’Irgoun s’empare de Jaffa. « Pendant ce temps, la Haganah a entrepris le ‘‘nettoyage’’ des villages arabes voisins. Le 14 mai, Jaffa est donc occupée et les derniers habitants sont concentrés dans un quartier. On recense un certain nombre d’exécutions sommaires, de viols et de tentatives de viols. Pillages et violences durent jusqu’au mois d’août48. »

Pillages, exécutions sommaires et viols sont des crimes de guerre qui font partie de toute entreprise de colonisation et qui participent à accroître la haine et le ressentiment des populations locales envers l’occupant.

Le 14 mai 1948, Ben Gourion proclame l’État d’Israël à Tel Aviv. Les membres de l’Irgoun sont intégrés à l’armée régulière Tsahal ( « Force de défense d’Israël »). Les anciens membres de l’Irgoun fondent le parti Hérout (« Liberté »), matrice de l’actuel Likoud, parti de la droite israélienne.

Une succession de conflits

En mai 1948, le gouvernement israélien se retrouve à la tête d’un État qui contrôle 80 % du territoire de la Palestine historique et notamment le bassin du lac de Tibériade, importante ressource d’eau potable. Suite à la promulgation de l’État juif, l’Égypte, la Jordanie, la Syrie et le Liban attaque Israël qui bénéficiera du soutien des Soviétiques et remportera la guerre jusqu’au cesser le feu de mars 1949. Les États arabes, quant à eux, n’ont trouvé aucune puissance extérieure pour les soutenir, cas unique en deux siècles dans l’histoire de la région.

L’été 1948 est celui de la Nakba (le désastre ou la catastrophe) : 800 000 Palestiniens deviennent des réfugiés. Plus de la moitié des habitants arabes de l’ancienne Palestine mandataire ira se réfugier vers la bande de Gaza ou les pays voisins. L’interdiction du retour est immédiate, les sionistes détruisent les moissons, les villages et confisquent les propriétés urbaines. Le refus du retour des réfugiés est encore en vigueur et en désaccord avec la résolution 194 de l’ONU adoptée le 11 décembre 194849.

Les accords d’armistice israélo-arabes de 1949, signés entre Israël et ses pays voisins, l’Égypte, le Liban, la Jordanie et la Syrie, laissent 78 % de l’ancien territoire de la Palestine mandataire britannique aux Israéliens, un territoire plus grand de 22 % que ce qui avait été prévu par le plan de partage de l’ONU en novembre 1947. Le territoire palestinien est démantelé pour dessiner la ligne verte, les frontières entre l’État d’Israël et ses voisins. L’Égypte obtient le contrôle de la bande de Gaza, où vivent actuellement 2,3 millions de réfugiés palestiniens, répartis dans les camps selon les noms des localités d’où ils viennent, la Jordanie celui de Jérusalem Est et de toute la Cisjordanie. Jusqu’en 1967, Jérusalem est coupée en deux : l’Ouest est israélien, l’Est jordanien. Les accords de 1949 confirment que les pays arabes ont toujours défendu leurs intérêts territoriaux avant la Palestine et les Palestiniens.

En 1951, le roi Abdallah de Jordanie est assassiné par un nationaliste palestinien à al-Aqsa50. La population de Jordanie est alors composée à 60 % de réfugiés palestiniens.

1964 est l’année de la création de l’OLP (Organisation de Libération de la Palestine)51. La Charte de fondation de l’OLP est d’inspiration marxiste, laïque et socialiste. Elle définit les objectifs du mouvement palestinien : un État de la mer au Jourdain, l’appartenance de la Palestine au monde arabe, l’autodétermination et le droit des Palestiniens à la souveraineté sur leur patrie, dénonciation de la déclaration Balfour et de la création d’Israël, mais affirmation de la coexistence avec les Juifs vivant en Palestine avant 194752.  L’organisation est composée de plusieurs partis politiques :

  • le Fatah, parti politique nationaliste palestinien dont le projet politique vise alors à une « Palestine démocratique non confessionnelle » ouverte aux juifs, musulmans et chrétiens sans distinction d’ethnie ou de religion. Le mouvement insiste sur la distinction entre Juif et sioniste et encourage la lecture d’intellectuels juifs progressistes afin de lutter contre les sentiments antisémites qui habitent une partie de la population arabe palestinienne53 ;
  • le Front Populaire de Libération de la Palestine (FPLP), organisation politique et paramilitaire d’inspiration marxiste-léniniste ;
  • le Front Démocratique Populaire pour la Libération de la Palestine (FDPLP) devenu en 1974 Front Démocratique pour la Libération de la Palestine (FDLP), parti politique et mouvement armé palestinien nationaliste et laïc avec des influences maoïstes.

En juin 1967, c’est la Guerre des six jours qui oppose Israël à l’Égypte, la Syrie, l’Irak et la Jordanie. Israël, vainqueur, conquerra les territoires de Cisjordanie, de Gaza, du Golan et de Jérusalem-Est. Pendant quelques heures le drapeau israélien sera planté sur la mosquée al-Aqsa. Du samedi 10 au dimanche 11 juin, tout un quartier arabe sera détruit face au mur des lamentations pour créer un lieu saint juif, une grande esplanade minérale. C’est la même année, qu’Israël commence à être en possession de la bombe atomique, qui a pu être développée secrètement avec le soutien de la France54.

Les territoires conquis en 1967 sont des territoires illégalement occupés55. La résolution 242 des Nations Unies stipule que les seules frontières reconnues sont celles de 1949. Le Sinaï sera occupé jusqu’en 1979, la Bande de Gaza jusqu’en 2005, le Golan syrien sera illégalement annexé par Israël en 1981. Ils viennent d’ailleurs de le réoccuper et bombardent la Syrie.

La guerre des six jours confère un poids politique nouveau à l’OLP et sera reconnue en 1974 par les Nations Unies56.

Droite israélienne et islamistes

La guerre du Kippour, en octobre 1973, opposa Israël à une coalition militaire arabe menée par l’Égypte et la Syrie et soutenue par l’URSS. Égyptiens et Syriens attaquent par surprise à la fois dans la péninsule du Sinaï et sur le plateau du Golan, territoires occupés par Israël depuis 1967. Le bilan humain sera de 2 691 morts et 8 135 blessés du côté israélien, 9 500 morts et 19 850 blessés du côté arabe. Israël, soutenu par les États-Unis, remporte la guerre. La guerre du Kippour aboutit sur une crise politique qui permettra à la droite de remporter, pour la première fois, les élections en 1977. L’Égypte et Israël entament des négociations de paix avec le président des États-Unis Jimmy Carter, à Camp David, lieu de villégiature du Président américain. L’Egypte reconnaît l’État d’Israël et récupère le Sinaï. Les accords de Camp David ont modifié la perception que les pays arabes avaient de l’Egypte qui n’a pas mis en avant l’autodétermination du peuple palestinien et a privilégié ses propres intérêts.

En 1982, des phalangistes chrétiens massacrent des civils palestiniens à Sabra et Chatila et expulsent les combattants de l’OLP du Liban, ce qui favorisera l’émergence du Hezbollah. Le rôle d’Ariel Sharon, alors Ministre de la défense, et de ses troupes dans le massacre de Sabra et Chatila est de nos jours encore discuté. Afin d’affaiblir la contestation nationaliste et laïque de l’OLP, les responsables israéliens ont misé sur les islamistes de la bande de Gaza57.

La première intifada, en 1987, se déclenche sur un événement « mineur »58 suivi d’un soulèvement populaire auquel femmes et enfants ont largement pris part. À l’époque, il n’y avait aucune frontière entre la bande de Gaza et Israël. Les deux sociétés se connaissaient bien, les Palestiniens travaillant en Israël et parlant l’hébreu. La première intifada met fin à ce semblant d’acceptation de l’occupation. Le mur sera construit dans les années 2000.

Le Hamas, « mouvement de la résistance islamique », a été créé 5 jours après la première intifada. Sa base se trouve à Gaza, c’est une branche du mouvement des Frères musulmans qui a sa base en Égypte. La première Charte du Hamas, publiée en 198859, prévoit l’instauration d’un État islamiste et théocratique sur le territoire de l’ancienne Palestine mandataire, l’annihilation d’Israël et un antisémitisme affiché60. Il la modifiera en 2017 renouant avec certains aspects de la charte de l’OLP insistant sur le caractère plus politique que religieux du conflit.

Le Hamas est d’abord soutenu par Israël :

« Plusieurs sources concordantes, tels des journaux, des journaux d’investigation et des chercheurs, montrent que le Hamas a reçu des financements de la part des services d’espionnage (Mossad) et de contre-espionnage (Shin Beth) israéliens, là encore pour diviser les forces palestiniennes, pour donner un tour religieux au conflit et ainsi présenter le conflit sous la forme d’une lutte entre ‘‘civilisation judaïque’’ et ‘‘civilisation musulmane’’ 61».

Si le mouvement nationaliste palestinien est plutôt socialiste et marxiste, il existe dès les années 1930 une islamisation de la cause palestinienne. La crise du panarabisme, dans les années 1980, est partout et les mouvements islamisant sont à la manœuvre, ce qui pousse l’OLP à aller vers un processus de paix. Les intifadas sont des moyens de créer des rapports de force favorables au processus de négociation. Mais pour négocier, il faut reconnaître Israël comme représentant des Juifs du territoire. L’OLP doit donc reconnaître l’État d’Israël en échange de la reconnaissance de l’État Palestinien sur les frontières de 1967, Gaza et Cisjordanie.

En 1993, ce sont les accords de paix d’Oslo, pensés par des Palestiniens de l’exil, la diaspora palestinienne, éduquée, occidentalisée, polyglotte, qui a développé des liens très forts avec les diplomates occidentaux. Ce ne sont pas les Palestiniens de l’intérieur. Au contraire, le Hamas s’est structuré au sein de la société palestinienne. La volonté de négociation d’Arafat est perçue comme une compromission. En Israël, le parti travailliste a remporté les élections contre le Likoud en 1992. Yitzhak Rabin (1922 – 1995), premier ministre, s’engage dans le processus de paix et crée l’Autorité palestinienne, entité gouvernementale qui administre les habitants arabes de Cisjordanie et de la bande de Gaza dans les zones A et B de Palestine définies par les accords d’Oslo II.

Le 4 novembre 1995, Yitzhak Rabin est assassiné par un membre de l’extrême droite israélienne. Yigal Amir62. Le processus de paix prend fin. En 1996, le Likoud remporte les suffrages et Benyamin Netanyahou devient premier ministre d’Israël. Ce dernier ordonnera le financement, pendant des années, du Hamas63.

II. L’opposition juive au sionisme : critique et rejet

Dès le départ, de nombreux Juifs ont critiqué le sionisme pour diverses raisons. La critique du sionisme n’est pas monolithique.

Pour de nombreux Juifs, c’est la méthode coloniale du sionisme qui se passe de l’avis des Arabes et mène un projet séparatiste, sa conception essentialiste des Juifs comme peuple race, sa promotion du messianisme, mobilisateur certes, mais dangereux, qui sont critiquables. Ces auteurs, sans remettre en question la légitimité d’un État juif, insistent pour prendre en compte le droit des populations locales.

Critiques du sionisme exclusif

Sans être exhaustifs, les principaux sionistes militants pour l’intégration des peuples arabes dans la construction d’un État sont :

  • Abraham Ginsberg (1856 – 1927) originaire d’Ukraine, connu sous le nom de plume de Ahad Haam, critique, à partir de 1889, le nationalisme sioniste. Selon lui, le véritable danger ne réside pas dans la judéophobie, mais dans l’assimilation qui conduit à une perte d’identité64. Mais plus important, dès 1891, à la suite d’un voyage en Terre sainte, il pose lucidement le problème des relations avec les habitants de la région. En Palestine, il ne reste pratiquement plus de terres cultivables disponibles dont une grande partie appartient à des Arabes. Il ne sera possible de se les procurer que par la corruption ;
  • Gershom Scholem (1897 – 1982), originaire de Berlin, dénoncera en 1931, l’hypocrisie du sionisme socialiste de Ben Gourion et des sionistes de gauche qui prétendent être pour la libération de tous les peuples, mais qui la refuse aux Palestiniens. Comme ses camarades du Brit Shalom ( « Alliance pour la paix » fondée en 1925), il accuse les sionistes de rendre service à l’impérialisme britannique, notamment en acceptant la Déclaration Balfour. Religieux, il défendait l’idée d’un sionisme spirituel, pacifique et non impérialiste qui permettrait de créer un foyer juif en Palestine. Comme beaucoup, le massacre de millions de Juifs sous le nazisme, l’a amené à se rapprocher des institutions sionistes et à abandonner l’idée d’un État inclusif ;
  • Hugo Bergmann (1883 – 1975), originaire de Prague, arrive à Jérusalem en 1920 et rejoint le groupe Brit Shalom. Il s’oppose à la Déclaration Balfour qui autorise l’empire britannique à donner un pays qui ne lui appartient pas à des Juifs qu’elle refuse d’accueillir sur son territoire. Selon lui, le sionisme aurait dû respecter des principes démocratiques sur la base d’un parlement ou d’un conseil législatif pour tous les habitants du territoire ;
  • Hans Kohn (1891 – 1971), originaire de Prague, sera influencé par le message décentralisateur du Mahatma Gandhi. Il envisage un État non religieux, deux langues officielles (l’hébreu et l’arabe), deux systèmes d’éducation séparatistes : « Le centre de gravité de l’expression de la volonté politique se trouvera dans les communautés. Il se développera de bas en haut ; l’intervention des instances suprêmes sera limitée aux seuls cas de nécessité absolue65 ». En 1921, il écrit : « La Palestine ne peut pas être un État-nation juif. Elle ne peut pas être juive comme l’Angleterre est anglaise, non seulement parce que l’État-nation ne constitue pas un pas en avant, mais aussi parce que la Palestine est concrètement impossible. La Palestine doit être binationale et ne pas être Eretz Israël66. » La révolte de 1929 l’aura profondément marqué et il écrira alors : « Nous adoptons la posture des innocents agressés. Il est vrai qu’en août les agresseurs étaient arabes. Ne disposant pas d’une armée, ils n’ont pas pu respecter les règles du jeu. Ils ont recouru à tous les moyens barbares qui caractérisent une révolte anticoloniale ; mais il nous appartient de voir les causes profondes de l’insurrection. Nous sommes depuis douze ans en Palestine, sans avoir recherché, ne serait-ce qu’une seule fois, l’accord des Arabes. Sans avoir tenu le moindre débat avec le peuple vivant dans ce pays. Nous nous sommes exclusivement reposés sur la force de la puissance britannique. Nous nous sommes fixé des objectifs qui allaient nécessairement dégénérer en conflit67. » ;
  • Natan Hofshi (1890 – 1980), anarchiste pacifiste originaire de Pologne, écrivait en 1934, après la désintégration de l’organisation Brit Shalom dont il faisait partie : « Cette association, qui formulait ses propositions pour une solution de la question judéo-arabe, s’est heurtée à des articles provocateurs, à des discours incendiaires, à des licenciements professionnels, à des menaces, à des appels au boycott et à des accusations calomnieuses de traîtrise. […] Le ‘‘Yishouv’’ (le proto-État juif en Palestine mandataire68), divisé en une multitude de partis, s’est uni dans sa haine et dans sa guerre contre Brit Shalom […]. La guerre était déclarée contre ceux qui s’opposaient à l’idée de la ‘‘nation’’69 » ;
  • Martin Buber (1878 – 1965), philosophe allemand, il diffusait en Allemagne les idées de Brit Shalom. Pendant la Seconde Guerre mondiale, il fut un fervent patriote allemand et conférera au conflit militaire une aura mystique. Mais il s’en repentira et développera par la suite une philosophie accordant une place centrale à l’empathie, à la proximité et à l’identification avec autrui. Ces sentiments, selon lui, définissent ce qui fait de l’homme un humain. Proche du mouvement anarcho-socialiste de son ami Gustav Landauer, il développera à la fin de la guerre une pensée anti-étatique qui vise à la reconstruction rapide de communautés humaines et sera partisan du mouvement kibboutzique en Palestine. Après 1948, il militait en faveur du retour sur son territoire d’une partie des réfugiés expulsés ou ayant fui et s’opposait aux confiscations massives de terres opérées par le gouvernement israélien. Il a abandonné l’idée d’un État binational pour un État fédéral du Moyen-Orient ;
  • Hannah Arendt (1906 – 1975)critique la stratégie nationale du sionisme qui fait alliance avec l’Empire britannique, souhaite instaurer un État sans prendre en compte les populations vivant depuis des millénaires sur les terres palestiniennes, qui recherchait la « protection des grandes puissances en échange de services possibles70. » Par-delà ses critiques du sionisme et d’Israël, elle a salué deux réalisations particulières : les kibboutz et l’Université hébraïque.

Inclusif ou exclusif, le sionisme a été et reste une entreprise de colonisation puisque la Palestine, qui n’est pas la Lune, n’a jamais été une terre inhabitée. Vouloir y instaurer un État au mépris des populations locales s’appelle bel et bien une colonisation et ne peut générer, comme l’ont bien compris les sionistes eux-mêmes, que conflits, haines, et crimes (épuration ethnique, génocide, etc).

C’est pour cette raison que de nombreux Juifs se sont opposés à la légitimité d’un État juif, ce qui dut être le cas des précédents s’ils avaient été conséquents.

Différents courants antisionistes

Pour les antisionistes juifs orthodoxes, le sionisme est une théorie allant à l’encontre de la volonté divine. Il trahit la tradition juive, met en danger le judaïsme et vise à être la nouvelle religion des juifs71 :

« (…) selon la tradition juive l’homme fort est celui qui arrive à contrôler ses propres passions : il est alors ‘‘plus puissant que celui qui conquiert une ville’’. La révulsion envers la guerre est claire et maintes fois articulée : ‘‘Dieu ne nous a pas envoyés en exil parce que nous n’avions pas d’armée, mais parce que nous avons péché.’’ La tradition orale interprète allégoriquement les versets bibliques qui mentionnent des instruments de guerre. Ainsi l’épée et l’arc qu’utilise le Patriarche Jacob contre ses ennemis deviennent la prière et la supplication. La victoire de Benayahou contre Moav prend la signification de l’étude de la Torah. La tradition situe l’héroïsme juif dans les salles d’étude plutôt que sur les champs de bataille72. »

« L’appui massif qu’offrent à l’État d’Israël des millions de partisans évangéliques [millénaristes et judéophobes] du sionisme est ouvertement motivé par le même espoir : le retour des juifs à la Terre sainte serait le prélude [du retour du Christ] de leur adhésion au christianisme ou, pour ceux qui s’y refuseraient, de leur destruction physique. Selon un observateur juif pratiquant, cette conception évangélique est ‘‘une pièce en cinq actes où nous disparaissons au quatrième’’ ».

À noter que Herzl, l’un des principaux fondateurs du sionisme, a envisagé de convertir massivement les juifs au christianisme73.

D’un point de vue politique et stratégique, un certain nombre d’antisionistes considèrent que les sionistes mettent en danger les juifs parce qu’ils ont « accepté la thèse centrale des antisémites selon laquelle les juifs constituent un corps étranger au sein des nations européennes. Depuis le début, il existe une confluence d’intérêts entre les antisémites, qui veulent se débarrasser des juifs, et les sionistes, qui veulent les concentrer tous sur un territoire74. »

Les juifs réformés prônent l’intégration dans la nation du pays hôte. Avant la Seconde Guerre mondiale, ils s’opposaient au sionisme mais depuis la Shoah, sans promouvoir le sionisme, ils soutiennent ceux qui souhaitent immigrer en Israël.75

Les juifs nationaux, comme l’était Lord Montagu, privilégient le pays dans lequel ils vivent à leur origine juive. Rappelons que Dreyfus a été accusé parce que l’antisémitisme considère que les juifs ne peuvent être des patriotes fiables, qu’avant d’être nationaux, ils sont juifs. Beaucoup d’entre eux rappellent qu’ils se sont battus pour être considérés avant tout comme des nationaux76.

Les juifs internationalistes, marxistes, communistes, s’opposent à la constitution d’un État national : Leon Trotsky, Rosa Luxembourg, Otto Bauer, Abraham Léon et le Bund.

  • Abraham Léon (1918 – 1944), militant trotskyste, analyse le rôle de la bourgeoisie juive et ses liens avec le capitalisme colonial dans la formation du sionisme : « l’idéologie sioniste, comme toute idéologie, n’est que le reflet défiguré des intérêts d’une classe77. » Pour lui, la principale source des souffrances des Juifs est le capitalisme et le sionisme est l’idéologie de bourgeois capitalistes ;
  • Léon Trotsky (1879 – 1940) s’oppose à l’isolationnisme des travailleurs juifs, il souhaite qu’ils prennent part au mouvement ouvrier des pays où ils sont exploités ;
  • L’Union générale des travailleurs juifs de Lituanie, de Pologne et de Russie, plus connue sous le nom de BUND (1897 – 1921), considère que le pays dans lequel ils vivent ne les empêche pas d’être un peuple, ils revendiquent leur autonomie culturelle – l’usage du Yiddish, par exemple, tout en insistant sur la lutte des classes plutôt que sur la constitution d’une nation.

Les communistes égyptiens, irakiens, du Moyen-Orient, et qui inclut des ligues juives, se battent contre le sionisme et pour l’égalité des citoyens.

Laïcs et religieux reprochent à l’État d’Israël, du fait d’une politique militaire et coloniale, de participer à l’augmentation de l’antisémitisme :

« Même si la propagande antisémite que diffusent certains médias arabes encourage la violence antijuive – et de ce fait renforce la conscience sioniste –, c’est la politique d’Israël à l’égard des Palestiniens, bien plus que son interprétation dans les médias, qui est à la source des actes antisémites [judéophobes] en Europe. […] L’association des juifs avec l’État d’Israël est facile, presque naturelle. D’aucuns regardent les juifs de la diaspora comme des étrangers ou encore des citoyens israéliens en séjour prolongé en France ou ailleurs dans le monde. Cette interprétation est particulièrement chère aux antisémites, pour qui l’existence d’un complot juif mondial est une évidence. L’association automatique des juifs à l’État d’Israël est fondamentale pour les sionistes qui, depuis les origines de ce mouvement politique il y a plus d’un siècle, se présentent comme les représentants du peuple juif tout entier. En se proclamant ‘‘l’avant-garde du peuple juif dans son ensemble’’, en parlant ‘‘au nom du peuple juif’’ les sionistes renforcent l’association automatique des juifs avec l’État Israël. Cela ne fait qu’encourager l’antisémitisme dans le monde en tribalisant le conflit et en l’exportant hors des frontières d’Israël78. »

L’amalgame entre Juifs et Israël accroît l’antisémitisme, et plus particulièrement, l’antisémitisme musulman. Mais quelle est donc cette identité israélienne que le sionisme a créée ?

De l’identité juive

Thomas Römer, professeur au collège de France et spécialiste des textes bibliques, écrit :

« On ne peut parler de juif ou de judaïsme avant l’époque perse, voire avant l’époque hellénistique, car c’est seulement vers le IVe siècle que se met en place un système religieux qui ressemble à ce que l’on désigne aujourd’hui sous le nom de judaïsme. Il faut donc éviter de parler de juif ou de judaïsme pour des périodes antérieures, pour lesquelles il convient d’utiliser des termes comme ‘‘israélite’’ ou ‘‘judéen’’.79 »

Pour consolider un récit national et une identité juive fédératrice, le sionisme s’est appuyé sur les textes de la Bible :

« Lorsque l’on feuillette des livres d’histoire d’Israël destinés à un public universitaire ou cultivé, on s’aperçoit que presque tous ces ouvrages suivent la chronologie biblique : les Patriarches, Moïse et l’Exode, la conquête du pays, l’époque des Juges, le Royaume uni de David et de Salomon, les deux royaumes d’Israël et de Juda jusqu’à la chute de Samarie, en 722 avant notre ère, le royaume de Juda jusqu’à la destruction de Jérusalem en 587 avant l’ère chrétienne, puis la restauration de Jérusalem et de Juda à l’époque perse. Aujourd’hui, il ne fait plus de doute que les histoires des Patriarches, de la sortie d’Égypte et de la conquête du pays ainsi que de l’époque des Juges ne reflètent pas des périodes successives et datables. Il s’agit au contraire de légendes ou de mythes d’origine qui, après coup, furent arrangés selon un ordre chronologique. Pour reconstruire l’histoire d’Israël et de Juda, il faut utiliser toutes les données que nous avons à disposition, à commencer par les données archéologiques80. »

Les recherches de Thomas Römer ont permis de distinguer deux visions différentes de l’identité juive :

« L’histoire des patriarches et celle de Moïse et de la sortie d’Égypte proposent au lecteur deux modèles d’identité différents. Selon les récits de la Genèse, l’identité juive se fait par la descendance : on est juif parce qu’on descend d’Abraham, d’Isaac et de Jacob ; c’est pourquoi on trouve dans ces textes de nombreuses généalogies. Si l’on passe à l’histoire de Moïse, on constate que les généalogies ont disparu. L’identité du peuple de Yahvé ne repose pas sur la descendance mais sur l’adhésion à l’alliance entre Dieu et Israël, dont Moïse devient le médiateur.81 »

« L’écrit sacerdotal, couvrant l’époque des origines, défend, contrairement à la pensée deutéronomiste, un monothéisme inclusif, affirmant que tous les peuples, sans le savoir, vénèrent le même dieu, dont seul Israël connaît la vraie identité, ce qui fait de lui un peuple à part. En fait, l’idée monothéiste pose aussi la question de la relation spécifique entre le dieu unique et un seul peuple. Cette relation est expliquée dans plusieurs livres bibliques et, notamment, dans le Deutéronome, par l’idée d’élection. C’est Yhwh qui, parmi tous les peuples, a choisi Israël pour en faire ‘‘sa part personnelle’’.82 »

Après la chute de la monarchie en 587 avant notre ère, l’école deutéronomiste, dont les membres sont des descendants des scribes et autres fonctionnaires de la cour judéenne, retravaille les rouleaux de l’époque pour donner un sens à l’exil et lui donner un aspect positif :

« C’est Yhwh lui-même qui a provoqué l’invasion babylonienne pour punir Juda du culte qu’il rendait à d’autres divinités (2 R 24,3 et 30). Les deutéronomistes cherchent ainsi à contrecarrer l’idée selon laquelle Mardouk et les autres dieux babyloniens auraient vaincu Yhwh. Ainsi, l’‘‘histoire deutéronomiste’’ constitue-t-elle le premier essai d’écriture d’une histoire complète d’Israël et de Juda, des origines jusqu’à la fin.83 »

Le récit israélien s’appuie sur la destruction du temple de Jérusalem en 70 :

« La révolte de l’an 70 de l’ère chrétienne, qui se solde par la destruction du temple de Jérusalem ; contrairement à la situation suivant la destruction du premier temple en 587 avant notre ère, il existe alors une institution de substitution, à savoir les synagogues qui deviendront, de façon définitive, le lieu dans lequel le judaïsme trouve son identité.84 » 

Thomas Römer insiste également sur une dernière révolte, celle de Bar Khokba de 132 à 135 qui s’achève sur une nouvelle défaite :

« Les Juifs, chassés de Jérusalem, sont alors et définitivement une minorité en Judée et s’installent tout autour du bassin méditerranéen. Les tendances sadducéennes, esséniennes et zélotes disparaissent ou deviennent minoritaires. C’est donc le judaïsme pharisien qui s’impose et qui par la suite deviendra le judaïsme ‘‘rabbinique’’ – rabbi signifiant le maître, l’enseignant. Pour définir l’identité de ce judaïsme et aussi en réaction au christianisme naissant, les Pharisiens décident, durant le IIe siècle, de définir exactement les livres sacrés du judaïsme, et c’est à cette époque seulement que naît la Bible tripartite qui se compose du Pentateuque (Torah), des Prophètes (Nebiim) et des Écrits (Ketubim). Rappelons cependant que, pour le judaïsme, contrairement au christianisme, ces trois parties n’ont pas la même autorité. Le Pentateuque constitue le centre qui doit être lu entièrement dans le culte synagogal, alors que les Prophètes et les Écrits sont considérés comme des ‘‘compléments’’ à la Torah. Pour le judaïsme, Dieu se révèle donc principalement via les 613 commandements de la Torah transmis à son peuple par l’intermédiaire de Moïse. Ainsi, c’est surtout la pratique et la quête du sens des commandements divins qui caractérisent le judaïsme et son dieu, dont il ne prononce pas le nom et dont il commémore la rencontre avec Israël en lisant le Pentateuque. Et c’est justement le Pentateuque qui a gardé des traces de mémoire d’un dieu qui, à l’origine, fut bien différent du dieu unique et transcendant tel qu’il est confessé par les religions monothéistes.85 »

Le monothéisme, en effet, est un concept qui apparaît très tardivement et qui n’apparaît pas dans la Bible hébraïque. Le mot « monothéisme » est un néologisme né au XVIIe siècle pour désigner la religion universelle de l’humanité. La frontière entre monothéisme et polythéisme est perméable dès l’époque Mésopotamienne. Les adorateurs de Yhwh, jusqu’à la fin du Ve siècle, pouvaient « encore pratiquer un culte sacrificiel en dehors de Jérusalem et vénérer Yhwh en compagnie d’autres divinités86. »

Pour résumer, Yhwh se manifeste d’abord auprès de Moïse en Égypte, il est lié à la guerre et à l’orage et devient petit à petit le dieu d’Israël et de Jérusalem. C’est après la destruction de Jérusalem et de Juda que Yhwh devient le seul dieu, créateur du ciel et de la terre, invisible et transcendant, et « qui clame cependant qu’il entretient avec son peuple une relation particulière. »

La lecture de l’histoire biblique, en vue de justifier le choix de la terre palestinienne pour y établir un État juif, est un roman national mais qui s’inspire plus de l’époque Babylonienne, en 587 avant notre ère, c’est-à-dire d’une élite obsédée par la reconquête d’un royaume et qui reconnaissait comme dieu tutélaire un dieu guerrier :

« Yhwh serait donc celui qui souffle, qui amène le vent, un dieu de l’orage qui peut aussi inclure des aspects guerriers, et une telle caractérisation s’applique assez bien […], aux fonctions primitives de Yhwh87. »

En effet, « dans la Bible hébraïque, aucun roi ne reçoit une loi ; cette fonction a été transférée à Moïse. C’est une autre manière de définir le judaïsme comme une religion qui n’a pas besoin de légitimation royale, voire étatique. C’est le Pentateuque qui se substitue aux institutions politiques, mais aussi au pays, de sorte qu’il devient, pour reprendre une expression célèbre du poète Heinrich Heine, une ‘‘patrie portative’’ qui permet au judaïsme de vénérer Yhwh en conservant les lois qui se trouvent dans la Torah et qu’on peut lire partout où il y a des synagogues.88 »

C’est parce qu’elle ne respecte pas le principe de Diaspora qu’une partie des juifs orthodoxes s’oppose encore aujourd’hui à l’idée d’une nation juive créée par l’homme et non pas Dieu. Pendant des siècles, être juif, c’était être né de mère juive ou se convertir au judaïsme. Être né d’une mère juive mais ne pas croire en Yahvé ne signifiait pour autant pas n’être plus juif. Pour ne plus l’être, il fallait se convertir à une autre religion ou, comme Spinoza, remettre en question les textes sacrés. En effet, Spinoza fut excommunié en 1656 de la communauté juive pour ses travaux philosophiques et, lui-même, n’a jamais utilisé en signature son nom hébraïque « Baruch ». Il signait « Benedict » ou « Benedictus ».

Pendant des siècles, le judaïsme, c’était porter allégeance à Yahvé en tant que Dieu unique et souverain, ne reconnaître ni Jésus comme messie ni Mahomet comme prophète, suivre la loi du Talmud, pratiquer les rituels religieux du judaïsme, respecter la Halakha, la loi juive.

Avec la Révolution française et l’émancipation, la plupart des juifs sont libérés du ghetto ou des zones réservées. Ils deviennent, à titre individuel, des citoyens à part entière. Un détachement critique à l’égard de la religion se développe alors dans le judaïsme. Des Juifs se sécularisent, deviennent athées, socialistes, libéraux, révolutionnaires, etc.

Le rôle de la religion dans la construction de l’identité juive israélienne

Jusqu’au XIXe siècle, il n’y avait rien de concret ou de réel dans l’aspiration nationale ou étatique juive, et les familles qui de temps à autre quittaient l’Europe pour la terre promise le faisaient pour y prier et y être enterrées, mais sans aucune espèce de conception politique collective. La Diaspora faisait partie intégrante de l’identité juive.  « … »

Après l’émancipation89 et le développement du mouvement de pensée la Haskala90, influencé par le mouvement des Lumières, de plus en plus de juifs percevaient la judéité à leur façon. Soit ils étaient des juifs religieux, orthodoxes, ultra-orthodoxes, et fondaient leur identité sur la pratique des rites religieux, soit ils étaient indifférents à leur judéité, soit ils étaient laïcs, non pratiquants ou conservant certaines pratiques d’origine religieuse par tradition (circoncision, Kippour, etc.). Les Juifs laïcs représentent en fait une multiplicité d’attitudes vis-à-vis des rites, de la croyance en Dieu ou de la pratique des Commandements91. Pour autant, la plupart s’identifiaient comme Juif puisqu’ « est juif qui est né de mère juive, ce qui signifie que le fait d’être Juif est un état, une situation objective, qui ne dépend pas de la croyance ou de la pratique du juif. 92»

Au cours de l’histoire, et notamment à partir du XIXe siècle, des Juifs ont totalement renié leur judéité, certains se sont convertis ou ont adopté d’autres religions, d’autres ont troqué leur identité juive pour une identité socialiste et révolutionnaire. Quant aux Juifs affirmant une identité juive, ils se sont divisés sur son contenu : identité juive laïque ou religieuse. Pour ces derniers, le judaïsme reste la foi du peuple qui a reçu la Torah au mont Sinaï93.

La Déclaration d’Indépendance a défini Israël à la fois comme un État démocratique ne faisant strictement aucune discrimination et comme un État juif, ce qui maintient le lien fondamental entre l’identité israélienne et le caractère juif, religieux, de l’État. Aussi, pour mettre en œuvre le projet sioniste, auquel de nombreux juifs s’opposaient, il était nécessaire de construire un roman national permettant de renouer avec une identité commune d’avant l’émancipation. Un nombre croissant de Juifs avaient pris des distances critiques vis-à-vis du judaïsme et s’intégraient dans des sociétés ayant des cultures et des valeurs extrêmement différentes. À part le fait de reconnaître ses origines juives, rien ne les reliait plus véritablement entre eux.

La politique anti-juive du IIIe Reich convaincra un nombre croissant de Juifs de la nécessité d’un État juif, terre d’accueil pour les Juifs du monde entier. Comme l’écrivit Hannah Arendt en 1971 : « Je n’appartiens à aucun groupe. Vous savez que le seul groupe auquel j’ai jamais appartenu était celui des sionistes. C’était bien sûr seulement à cause d’Hitler. C’était entre 1933 et 1943. Ensuite, j’ai rompu94. »

La politique nazie a tué environ 11 millions de personnes. Selon l’historien américain Raul Hilberg, 5 100 000 victimes juives sont mortes durant la Shoah95. 50 % des Juifs d’Europe furent assassinés et 40 % du judaïsme mondial, alors très majoritairement européen. Laïcs, non-croyants, indifférents ou non à leur judéité, s’identifiant Allemands, Polonais, Français, etc., furent identifiés comme appartenant à la « race juive » par le régime nazi qui catégorisait les Juifs selon leur ascendance  : « D’après les définitions édictées le 14 novembre 1935, était ainsi considérée comme juive à part entière toute personne issue de trois grands-parents juifs au moins, ayant 2 grands-parents s’il appartenait à la religion juive ou bien était mariée à un (e) juif (ve) ou encore était issue d’un mariage ou d’une relation extra-maritale entre un juif et un non-juif après le 15 septembre 193596. »

Rappelons qu’à ces cinq millions de victimes juives s’ajoutent cinq millions de personnes assassinées qui n’étaient pas juives : Roms, Polonais et autres Slaves, personnes souffrant d’un handicap physique ou mental, témoins de Jéhovah, homosexuels, clergé dissident, communistes, socialistes, ceux que les nazis qualifiaient d’« asociaux » parce qu’ils ne se conformaient pas à leurs normes sociales, ennemis politiques, résistants97. Les historiens estiment que 250 000 à 500 000 Roms et Sintis ont été assassinés pendant l’Holocauste98. Roms, Sintis, Juifs étaient coupables par essence et risquaient de « contaminer le patrimoine génétique de la population européenne99. »

Pour assurer un projet de vie collective juive et consolider l’identité juive, le sionisme s’appuiera avant tout sur les religieux ultra-orthodoxes qui accordent une place privilégiée au récit du Pentateuque, à l’identité juive telle que conçue depuis 2 500 ans100, c’est-à-dire une identité qui accorde une place privilégiée à la pureté de la « race ». L’identité israélienne est ainsi, dès les débuts de l’État, fondée sur le judaïsme.

En effet, la relation entre le sionisme et le judaïsme orthodoxe est consolidée dès 1947, année où Ben-Gourion adresse une lettre (la lettre dite du « Statu Quo ») aux Sages de la Torah, c’est-à-dire aux grands dirigeants religieux du parti ultra-orthodoxe antisioniste Agoudat Israël, en leur promettant par avance que l’État d’Israël ne violera aucun des Commandements divins les plus fondamentaux : le Shabbat sera le jour férié hebdomadaire, les jours de fête juive seront respectés, on mangera casher dans toutes les cantines publiques et à l’armée, les tribunaux rabbiniques garderont la haute main sur l’état civil et sur les mariages, il n’y aura qu’un mariage religieux et pas de mariage civil, l’autonomie rigoureuse des systèmes d’éducation religieux sera respectée sans interférence de l’État, les jeunes des académies talmudiques ne seront pas mobilisés dans l’armée, etc101. Ces promesses sont à l’opposé de tout projet politique laïc. Le mariage religieux permet aux rabbins d’avoir un rôle essentiel dans la définition du lien national entre Juifs, ce qui n’est pas sans conséquence sur le statut juridique des individus102.

Le 5 juillet 1950, la Loi du retour stipule que « tout Juif a le droit d’immigrer en Israël ». La Loi sur la citoyenneté du 1er avril 1952 conférait automatiquement la citoyenneté israélienne à quiconque pouvait faire foi de son ascendance juive. Il fallait des critères objectifs pour valider une affiliation juive. En 1958, pour tenter de définir une identité juive, Ben Gourion sollicite l’avis d’un « conseil des sages d’Israël ». Pour les juifs ultra-orthodoxes, l’identité juive est très restrictive : est juif qui est né de mère juive et ne s’est pas converti à une autre religion. Cette définition sera vivement contestée par les courants libéraux du judaïsme103. Dans l’État juif d’Israël, qui se donne pour mission d’être le centre mondial du judaïsme, définir une identité juive est source de débats importants. Depuis le début, l’identité nationale israélienne se confronte à deux tendances : d’un côté, les haredim, qui ramènent la nation à sa substance religieuse, de l’autre, les hilonim, qui renvoient l’État à sa neutralité laïque.

Depuis 1965, chaque résident d’Israël doit renseigner son identité religieuse. Les enfants nés d’une mère non juive ou d’une mère convertie après leur naissance devaient également se convertir auprès des institutions religieuses orthodoxes, qui restaient les seules habilitées à valider la judéité des citoyens israéliens.

La multiplication des mariages mixtes est perçue comme une menace pour la survie de la « race » juive, c’est pour cette raison que le mariage civil n’existe pas en Israël. Le seul type de mariage reconnu est le mariage religieux. Les laïcs se marient donc à l’étranger (ou en ligne104) et demandent ensuite la nationalité pour leur époux ou se convertissent pour pouvoir se marier en Israël. En 2016, 68 % des Israéliens soutiennent la création d’une institution de mariage laïque105.

L’importance que l’État d’Israël accorde à la filiation juive conduit à valider la nationalité juive par des tests ADN106. Comment nomme-t-on un État, et une religion, qui accorde autant d’importance à l’héritage génétique de sa population ?

Cette politique, qui s’appuie sur le judaïsme pour créer la citoyenneté israélienne, s’oppose vigoureusement à toute concession territoriale aux Palestiniens et au vivre ensemble.

Pour de plus en plus d’Israéliens aujourd’hui, il semble difficile de concilier démocratie et religion. Le poids du judaïsme sur les institutions israéliennes est une des causes de l’importante émigration de ces dernières années107.

Il y a toujours eu, parmi les Israéliens, des gens qui pensaient qu’il fallait « évacuer l’identité juive », couper définitivement les ponts avec le judaïsme et développer une identité purement israélienne, sans aucun lien avec le passé juif. De plus en plus d’Israéliens, sont conscients du fait que la minorité arabe d’Israël ne peut pas s’identifier à un État sioniste et juif, et que c’est un grand problème à résoudre de façon démocratique.

« Comment ces 20 % de la population pourraient-ils chanter un hymne national qui parle du retour des Juifs à Sion, comment pourraient-ils s’identifier à un drapeau national qui porte l’Étoile de David ? Comment pourraient-ils adhérer à un État dont une des lois fondamentales est la Loi du retour ? C’est pourquoi de plus en plus de voix (encore très minoritaires) s’élèvent pour demander qu’Israël devienne ‘‘l’État-de-tous-ses-citoyens’’, un État libéral à l’occidentale, où le critère fondamental serait la citoyenneté et non l’appartenance confessionnelle ou ethnique108. »

Cette identité sioniste est une des raisons pour lesquelles de nombreuses critiques antisionistes, comme nous l’avons exposé précédemment, affirment que le nationalisme sioniste est une nouvelle forme d’antisémitisme et plus particulièrement de racisme anti-arabe.

Le sionisme anti-arabe

Le mot antisémite est apparu en 1880 avec les Cahiers antisémites de Wilhelm Marr. Il a été relayé six ans plus tard sur la scène politique allemande par le Parti antisémite.

« L’adjectif « sémitique » a été forgé par l’orientaliste allemand A. L. Schlözel dans le tome VIII (1781) du Repertorium für biblische und morgenländische Literatur de J. G. Eichhorn, pour désigner des langues dont la parenté était perçue dès le Moyen Âge par les docteurs juifs : l’hébreu, l’araméen et l’arabe. L’appellation était choisie par référence au « tableau des peuples » de la Genèse (x) où Sem, fils de Noé, est donné comme le père d’Abram et l’ascendant d’Eber, éponyme des Hébreux, ainsi que de Yoqtan, ancêtre de diverses populations d’Arabie109. »

À l’origine, le terme sémite est un terme linguistique, et non racial ou ethnique110. À l’époque moderne, il désigne des populations descendant de ces peuples antiques, à savoir les Arabes, les Juifs, les Assyriens ou encore les Éthiopiens de langue amharique.

La haine des Arabes est donc bien de l’antisémitisme111.

L’État israélien est-il raciste ?

Bien qu’officiellement présentés comme des citoyens égaux, les Palestiniens vivant en Israël voient leur identité palestinienne niée par l’usage institutionnalisé de l’expression « Arabes israéliens ». « Alors que la loi sur la citoyenneté de 1952 accorde automatiquement celle-ci à tout Juif qui immigre dans le cadre de la loi du retour, les Arabes ne l’ont obtenue que s’ils se trouvaient, entre le 14 mai 1948 et l’entrée en vigueur de la loi, de façon ininterrompue sur le territoire qui est devenu israélien112. »

Cette appellation s’est longtemps imposée jusque sur leurs pièces d’identité où figurait, jusqu’aux années 2000, la mention « nationalité : arabe » – en opposition à la « nationalité juive » réservée aux citoyens juifs. Même si cette mention a disparu, « l’ONG Adalah recense au moins 65 lois qui structurent l’infériorité de la « nationalité  » arabe en Israël113 ».

Une kyrielle de lois foncières, votées au cours des années 1950, conduisit à l’expropriation de la plupart des terres privées arabes, sous des motifs juridiques bien contestables114. Le Fonds National Juif, ou « fonds pour la création d’Israël » (FNJ), a expulsé les populations locales du Néguev sur des dizaines de milliers d’hectares115. Les Bédouins (nomades) qui traversent ces terres n’ayant aucun titre de propriété, donc de droit formel, l’État d’Israël s’autorise à les transférer dans des villages créés sur mesure116. De nos jours, 13 % des terres de l’État sont gérées par le FNJ qui interdit leur vente ou leur location à des non-Juifs.

La loi du 31 juillet 2003, votée par le gouvernement israélien, interdit, afin de limiter les mariages mixtes, aux citoyens israéliens mariés à des Palestiniens ou Palestiniennes des territoires occupés de vivre en Israël, entraînant la fragmentation des familles. D’abord présenté comme une mesure de sécurité, ce statut cherche en réalité à réduire le nombre d’Arabes présents en Israël au titre du regroupement familial117.

En 2011, une loi autorise le ministère des finances à réduire de façon drastique le budget des associations et communautés locales qui commémorent la Nakba au lieu de célébrer la création de l’État juif. Cette même loi autorise, via les commissions d’admissions, les communautés juives de ces régions à décider d’admettre ou non tout nouvel arrivant dans ces zones. Cette loi a été dénoncée par les défenseurs des droits de l’homme.

En 2018, la loi fondamentale sur l’État-nation stipule que seul le peuple juif dispose du droit à l’autodétermination en Israël, sans préciser les frontières concernées – ouvrant ainsi la voie à une interprétation englobant l’ensemble du territoire du Nil à l’Euphrate. Elle érige « l’implantation juive » en « valeur nationale » et inscrit dans le droit la légitimité d’une suprématie raciale et nie explicitement le droit à l’autodétermination du peuple palestinien118.

Rappelons les paroles de Nissim Vaturi, un des vices-présidents de la Knesset, membre du Likoud, qui déclarait en 2023 qu’il fallait vider « Gaza des Gazaouis » et en 2024 qu’il fallait « brûler Gaza »119. La commission éthique de la Knesset a estimé, au sujet de ces remarques, que rien « ne permet de justifier qu’il a violé les règles d’éthique120 ». Le ministre du Patrimoine, Amichaï Eliyahu, du parti d’extrême-droite Otzma Yehudit, a également déclaré que l’une des options d’Israël dans la guerre contre le Hamas « serait de larguer une bombe nucléaire sur la bande de Gaza »121. Il n’a pour autant pas été démis de ses fonctions. Pour le gouvernement Israélien, ces hommes n’ont pas tenu des propos éthiquement condamnables, ce qui en dit long sur la manière dont les députés, et donc une partie de leurs électeurs, perçoivent les non-Juifs. Il est remarquable que le seul à avoir été suspendu de la Knesset pendant deux mois soit Ofer Cassif, le seul à avoir pris position pour les Palestiniens122.

Ce racisme envers les musulmans est aussi de plus en plus présent en Europe où les extrêmes droites exploitent un populisme xénophobe, essentiellement antimusulman. Ces extrêmes droites, que ce soit le Rassemblement National français, le Mouvement Cinq Étoiles, la Ligue du Nord en Italie ou l’UKIP en Angleterre, se sont rapprochées de l’État d’Israël. Quelques partis réellement fascistes ou néo-nazis continuent cependant, comme l’Aube dorée en Grèce, à répéter le mantra judéophobe dans des pays quasiment sans Juifs. Ilan Greilsammer distingue « trois attitudes sensiblement différentes au sein de la droite ‘‘dure’’ à l’égard du sionisme123 » :

  • les nostalgiques de l’époque coloniale (ou ex-OAS en France, par exemple) qui soutiennent l’État d’Israël comme une sorte d’avant-poste de l’Occident anticommuniste, représentant la civilisation chrétienne contre le Tiers-Monde ;
  • les vrais antisémites pour qui le sionisme est positif, puisqu’il encourage le départ des Juifs (comme ceux qui, autrefois, souhaitaient leur émigration à Madagascar ou ailleurs) ;
  • un noyau dur « d’antisionisme » pour qui « l’Empire » sioniste, israélien ou juif, est l’ennemi numéro 1, un ennemi même plus dangereux que les Arabes ou l’Islam. En France, ce noyau est représenté, entre autres, par la nébuleuse qui gravite autour de Dieudonné et d’Alain Soral.

Dans tous les pays européens, la plupart des partis d’extrême droite se concentrent sur la haine de l’étranger, les migrants et surtout l’islamophobie.

La politique menée depuis plus de 120 ans en Palestine est une des raisons de l’augmentation des violences antijuives de la part des populations musulmanes124, pour qui sioniste, Israélien et Juif sont des mots équivalents. Beaucoup de jeunes musulmans français font l’amalgame entre Israéliens et Juifs. Cette crainte d’un amalgame entre Israël et Juifs est dénoncée par les antisionistes juifs dès les débuts du sionisme et est également une des craintes de l’UJPP (Union Juive Pour la Paix). Crainte malheureusement justifiée125.

Du terrorisme palestinien

Pour certains, tous les attentats perpétrés en vue de la libération de la Palestine sont des actes de résistance, pour d’autres des actes terroristes et condamnables.

Pour les tenants de la version terroriste, l’absence d’État-nation palestinien après la chute de l’Empire ottoman justifie l’entreprise sioniste. Cet argument peut aussi être inversé, les Juifs n’ayant pas d’État en Palestine et l’ayant obtenu par des actes terroristes. Avec ce genre d’argument, on peut se féliciter de la destruction des Amériques sous prétexte qu’il n’y avait pas d’État-nation arawak. C’est considérer que les Sioux, Apaches, Iroquois, etc., étaient des terroristes quand ils luttaient contre le vol des terres qu’ils habitaient depuis des millénaires.

Pour certains, l’islamisme politique de l’Iran justifie l’attaque d’Israël. La lutte contre l’Islam se pare de valeurs universalistes alors qu’elle défend l’interventionnisme. Or, nous pensons que défendre des valeurs universalistes justes ne doit pas passer par l’interventionnisme, parce que, d’une part, l’interventionnisme est toujours guerrier et impérialiste, et parce qu’en toute logique, accepter l’interventionnisme, c’est accepter de risquer de le subir.

Le conflit israélo-palestinien n’a jamais pris fin. Les tentatives d’accord de paix ont échoué, notamment du fait qu’Israël n’a jamais vraiment voulu cette paix. Israël et les Palestiniens sont donc bel et bien en guerre depuis 1948.

Nul besoin de faire appel au mot « terrorisme » pour s’horrifier du massacre du 7 octobre. Le Hamas étant un parti élu en guerre contre Israël, il semble plus cohérent de parler de crimes de guerre de type terroriste.

Les crimes de guerres comprennent, entre autres :

  • la prise d’otages ;
  • le fait de « diriger intentionnellement des attaques contre la population civile en tant que telle ou contre des civils qui ne participent pas directement part aux hostilités » ;
  • le fait de « diriger intentionnellement des attaques contre le personnel, les installations, le matériel, les unités ou les véhicules employés dans le cadre d’une mission d’aide humanitaire ou de maintien de la paix conformément à la Charte des Nations Unies, pour autant qu’ils aient droit à la protection que le droit international des conflits armés garantit aux civils et aux biens de caractère civil » ;
  • le fait de « déclarer qu’il ne sera pas fait de quartier »126.

Tous ces crimes ont été commis par le Hamas mais aussi par le gouvernement israélien127, et ce à de nombreuses reprises. Le gouvernement israélien est accusé aussi de génocide. La question divise, notamment les juristes, mais pour certains elle ne fait aucun doute :

« Dès le mois d’octobre 2023, les deux principales autorités de l’État – le président, Isaac Herzog, et le premier ministre, Benyamin Nétanyahou – font en effet référence, dans des discours large-

ment médiatisés, à la destruction du peuple d’Amalek par les Hébreux en parlant des Palestiniens de Gaza : dans le récit biblique, ce peuple nomade attaque sans raison les Hébreux qui les exterminent en retour, comme l’ordonne leur Dieu. Quant au ministre de la défense, il qualifie l’ensemble des Gazaouis d’ ‘‘animaux humains’’. Une déshumanisation qui n’a fait qu’aller crescendo et qui

est, bien souvent, le prélude à un massacre de masse, voire un génocide128 ».

Les Palestiniens et les sionistes sont en guerre pour des raisons différentes. Dès la naissance du mouvement sioniste, ainsi que l’examen des évènements dans le temps le confirme, le sionisme a persisté dans la volonté de s’approprier toute la terre de Palestine129.

Le Hamas, quant à lui, comme sa charte de 2017 l’indique, « considère la création d’un État palestinien entièrement souverain et indépendant, avec Jérusalem comme capitale, selon les limites du 4 juin 1967, avec le retour des réfugiés et des déplacés vers les maisons d’où ils ont été expulsés ». Cela signifie qu’il reconnaît l’État israélien sur les frontières de 1967130.

Les sionistes souhaitent accéder à un territoire pour y faire régner une idéologie raciste tout en l’exploitant financièrement131. Pour y parvenir, il faut bien anéantir toute résistance gazaouie et exclure les potentielles revendications nationales d’un peuple colonisé, comme cela a été dit et redit par les politiciens du gouvernement israélien. Ils envisagent, par ailleurs, de créer une « ville humanitaire » à Rafah, ville totalement détruite, pour y « accueillir » 600 000 Palestiniens qui « devraient subir un “contrôle de sécurité”, dans le but de vérifier leur identité et d’évaluer leur profil. Une fois à l’intérieur, il leur sera interdit d’en ressortir132 ».

Conclusion

Les juifs antisionistes ont, dès les débuts du sionisme, dénoncé une politique coloniale raciale qui ne pouvait mener qu’à des guerres fratricides, à un amalgame entre sionisme et Juifs, et une recrudescence d’agressions antijuives.

La guerre que mènent aujourd’hui Israéliens et Palestiniens est le résultat de plusieurs décisions politiques israéliennes, mais aussi européennes, qui ont refusé de prendre en compte l’autodétermination des peuples, c’est-à-dire de respecter les populations locales du territoire palestinien.

L’antisionisme laïc n’est pas celui de l’extrême droite qui considère que les Juifs sont une race. Il s’oppose à l’idée d’un peuple race et critique l’utilisation des tests ADN pour obtenir la citoyenneté israélienne. Les antisionistes, juifs et arabes133, ne veulent pas la destruction de l’État désormais existant mais un changement politique.

Si l’on considère que le sionisme est la création d’un État juif sur un territoire habité, alors l’antisionisme est une revendication de la gauche anticoloniale et antiraciste. L’Israël actuel est la réalisation d’un courant sioniste. D’autres visions juives ont existé et existent. Très rares sont celles qui sortent d’une identité raciale juive. Cela semble pourtant être la seule issue pacifique pérenne, au travers la transformation d’Israël – de la Cisjordanie et de Gaza – en un État unique de Palestine, non « binational » (sinon cela reste dans le racialisme), mais laïc et démocratique, pour tous les habitants actuels, où chacun est libre de s’installer où il veut et de choisir le conjoint de son choix, si possible un Autre, pour que cesse le tribalisme, le séparatisme et la guerre.

Ana Minski

Relecture et corrections : Lola et Annie Gouilleux

Notes

1« Romaniotes », Wikipedia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Romaniotes

2« Juifs arabes », Wikipedia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Juifs_arabes

3Youssef Courbage, « Les Juifs dans l’Empire ottoman jusqu’à la déclaration Balfour (1917) », 2018 : https://www.carep-paris.org/wp-content/uploads/2020/04/YoussefCOURBAGE_Les-Juifs-dans-lEmpire-ottoman-jusquà-la-Déclaration-Balfour.pdf

4« Mizrahim », Wikipedia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Juifs_Mizrahim

5« Amants de sion », Wikipedia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Amants_de_Sion

6Henry Laurens, La question de Palestine, tome 1, Fayard, 2002,  pp. 171.

7Vincent Lemire, « Anatomie d’un conflit », épisode 1, France inter : https://www.youtube.com/playlist?list=PL43OynbWaTMJPEgiy4LBhFcHt6p8H4UCw

8Neville J. Mandel, « Ottoman Policy and Restrictions on Jewish Settlement in Palestine: 1881-1908, Part I »,

Middle Eastern Studies, vol. 10, n° 3, 1974, pp. 312-332 in Youssef Courbage, Les Juifs dans l’Empire ottoman jusqu’à la déclaration Balfour (1917), 2018

9Youssef Courbage, Les Juifs dans l’Empire ottoman jusqu’à la déclaration Balfour (1917), 2018

10Une caractéristique importante des pogroms réside dans l’identité des personnes perpétrant les violences et le positionnement des autorités et des services sécuritaires. Les exactions et massacres commis lors d’un pogrom sont l’œuvre de la population générale. Il n’y a pas d’organisation et de planification officielle de la part des autorités.

Le pogrom désigne les massacres de Juifs dans l’Empire russe en 1881-1882. Il a été attribué par la suite à d’autres massacres de Juifs : en 38 à Alexandrie, par exemple. Mais le terme est inadapté, les causes pour lesquelles il y a eu un massacre de Juifs ne sont pas raciales mais politiques. Il en est de même pour les actes criminels du 7 octobre 2023 commis par le Hamas. En droit international, ce n’est pas l’attaque qui est un crime en soit, mais certaines actions (et cibles) lors de ces attaques. Les Palestiniens ne visent pas les Juifs parce que juifs mais parce que colons. L’attaque du 7 octobre est un acte criminel du fait qu’elle s’est attaquée à des civils.

11« Hébreu moderne », Wikipedia : https://fr.wikipedia.org/wiki/H%C3%A9breu_moderne

12Les sionistes ont d’abord pensé à l’Argentine ou à l’Ouganda, mais compte tenu de l’importance de Jérusalem, il leur est paru évident que le foyer national devait se constituer autour de la ville « sainte ». Le sionisme tire d’ailleurs son nom de Sion, une des collines qui entourent Jérusalem.

13Un judaïsme revisité pour convaincre une majorité de juifs et les opposants juifs au sionisme. Ce judaïsme revisité mobilise le rêve du retour à la terre sainte.

14À partir de la fin du XVIIIe siècle, certains juifs, s’inspirant du mouvement des Lumières, développent la pensée de la Haskala et prennent leur distance avec le judaïsme.

15Ilan Greilsammer, « Sur l’antisionisme et l’antisémitisme dans la France d’aujourd’hui ». Dans J. Allouche Benayoun, C. Attias-Donfut, G. Jikeli et P. Zawadzki L’antisémitisme contemporain en France : Rémanences ou émergences ?, éditions Hermann, 2022, p. 249-274. https://doi.org/10.3917/herm.allou.2022.01.0249.

16Ilan Greilsammer, « Sur l’antisionisme et l’antisémitisme dans la France d’aujourd’hui ». Dans J. Allouche Benayoun, C. Attias-Donfut, G. Jikeli et P. Zawadzki L’antisémitisme contemporain en France : Rémanences ou émergences ?, éditions Hermann, 2022, p. 249-274. https://doi.org/10.3917/herm.allou.2022.01.0249.

17Theodor Herzl, L’État des Juifs, Paris, La Découverte, 2008, 182 p.

18Cité par Yosef Gorny, « Politique et imagination », op. cit., p. 24, in Shlomo Sand, Deux peuples pour un État. Relire l’histoire du sionisme, 256 p.

19Julie d’Andurain, « La ‘‘Grande-Syrie’’, diachronie d’une construction géographique (1912-1923) », Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée, 141, 2017, mis en ligne le 25 octobre 2017, consulté le 20 juin 2025 : http://journals.openedition.org/remmm/9790 ; https://doi.org/10.4000/remmm.9790

20L’expression « foyer national » est plus qu’équivoque.

21La Déclaration Balfour : https://web.archive.org/web/20121226193333/http://www.ladocumentationfrancaise.fr/dossiers/d000055-israel-soixante-ans-apres-entre-normalite-et-singularite/document-la-declaration-balfour-2-novembre-1917

22Béatrice Orès, Michèle Sibony, Sonia Fayman, Antisionisme, une histoire juive, éditions Syllepse, 2023,

23Art. 22 du Traité de Versailles de 1919, Pacte de la Société des Nations : https://mjp.univ-perp.fr/traites/sdn1919.htm

24Mandat pour la Palestine : https://ia803208.us.archive.org/26/items/palestine-official-reports/263_text.pdf

25Art. 6 du Mandat pour la Palestine

26Ibid.

27Ben Gourion cité par Zeev Sterrnhell, Aux origines d’Israël (1996), p. 388, sur le site : https://ujfp.org/a-propos-de-la-manifestation-du-crif-les-reactions-de-membres-de-lujfp-et-de-uavj/

28Ilan Greilsammer, « Sur l’antisionisme et l’antisémitisme dans la France d’aujourd’hui ». Dans J. Allouche Benayoun, C. Attias-Donfut, G. Jikeli et P. Zawadzki L’antisémitisme contemporain en France : Rémanences ou émergences ?, éditions Hermann, 2022, p. 249-274. https://doi.org/10.3917/herm.allou.2022.01.0249.

29Traduit de l’allemand par Yfaat Weiss, « Ethno-nationalisme d’Europe centrale et binationalisme sioniste », in Adi Gordon (dir.), Brit Shalom et le Sionisme binational, op. cit., p. 104-105, in Shlomo Sand, Deux peuples pour un État, p. 74

30« En Palestine, la religion musulmane a récupéré l’héritage biblique, et les grands prophètes de l’Ancien Testament sont devenus des saints vénérés de l’islam et sont honorés par des cultes annuels. Le plus important est celui de Moïse, dont le tombeau est proche de Jérusalem. Tous les ans, la population des campagnes se réunit autour de la sépulture présumée et marche en cortège jusqu’à Jérusalem. » Questions de Palestine tome 1 p. 779

31Henry Laurens, La question de Palestine, tome 1, Fayard, 2002, p. 847

32Henry Laurens, La question de Palestine, tome 1, Fayard, 2002, p. 848

33Hébron est une ville à haute valeur symbolique pour les trois religions abrahamiques puisqu’elle abrite le tombeau des patriarches.

34« Liste des attentats de l’Irgoun », Wikipedia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_attentats_de_l%27Irgoun

35Marius Shattner, Histoire de la droite israélienne, de Jabotinsky à Shamir, éditions Complexes, 1991, 180 p.

36Cité par Marius Schattner, Histoire de la droite israélienne, 1991, P.84-86.

37Collu-Moran, R. (2011). Le sionisme et le retour à la terre. Transversalités, 119(3), 53-73. https://doi.org/10.3917/trans.119.0053.

38Henry Laurens, La question de Palestine, tome 2, Fayard, 2002, p. 572.

39Le nationalisme palestinien s’amorce à la fin de l’Empire ottoman : Helena Lindholm Schul, The Reconstruction of Palestinian Nationalism: Between Revolution and Statehood, Manchester University Press, 1999,  157.

40https://www.lemonde.fr/un-si-proche-orient/article/2025/01/12/en-israel-les-extremistes-juifs-de-l-irgoun-et-du-lehi-progressivement-rehabilites-apres-les-attentats-de-1944-1948_6493883_6116995.html

41Henry Laurens, La question de Palestine, tome 2, Fayard, 2002, p. 572.

42Dominique Vidal et Sébastien Boussois, Comment Israël expulsa les palestiniens (1947-1949), 2009.

43C’est ce qui sera fait en 1947 avec la partition de l’Inde britannique lors de sa décolonisation, découpée selon des critères religieux qui a occasionné le déplacement de 15 millions de personnes, et plus d’un million de morts lors de ces déplacements.

44Henry Laurens, La question de Palestine, tome 2, Fayard, 2002, p. 1031.

45Henry Laurens, La question de Palestine, tome 3, Fayard, 2002, p. 78

46Jean-Pierre Filiu, « L’assassinat par Israël du médiateur de l’ONU en Palestine », blogLe Monde, 14 octobre 2018 : https://www.lemonde.fr/blog/filiu/2018/10/14/lassassinat-par-israel-du-mediateur-de-lonu-en-palestine/

47Henry Laurens, La question de Palestine, tome 3, Fayard, 2002,  p. 88

48Henry Laurens, La question de Palestine, tome 3, Fayard, 2002,  p. 98.

49Henry Laurens, La paix impossible, La cimade: https://www.youtube.com/watch?v=4XSBHjfcvkU

50Vincent Lemire, Histoire d’une ville-monde des origines à nos jours, Flammarion, 540 p.

51Perspective Monde, « Création de l’Organisation de libération de la Palestine », mai 1964 : https://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMEve/87

52Charte nationale palestinienne de 1964, Association France Palestine Solidarité : https://www.france-palestine.org/Charte-nationale-palestinienne-de,1794

53Extrait « ‘‘La révolution palestinienne et les Juifs’’, un livre pour l’histoire et pour demain », Orient XXI, 3 juin 2021 : https://orientxxi.info/lu-vu-entendu/la-revolution-palestinienne-et-les-juifs-un-livre-pour-l-histoire-et-pour,4805

54Yann Lagarde, « Comment Israël a secrètement acquis la bombe nucléaire ? », Radio France, 1er juillet 2025 : https://www.radiofrance.fr/franceculture/comment-israel-a-secretement-acquis-la-bombe-nucleaire-4796724

55ONU info, « La CIJ déclare que l’occupation des territoires palestiniens par Israël viole le droit international », 19 juillet 2024 :  https://news.un.org/fr/story/2024/07/1147211

56Histoire du conflit israélo-palestinien, « Épisode 3/4 : Histoire de l’Organisation de libération de la Palestine », Radio France, 18 octobre 2023 : https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/le-cours-de-l-histoire/histoire-de-l-organisation-de-liberation-de-la-palestine-4756387

57Jean-Pierre Filiu, « Le terrible coût pour Israël de la marginalisation de l’OLP », Le Monde, 29 septembre 2024 : https://www.lemonde.fr/un-si-proche-orient/article/2024/09/29/le-terrible-cout-pour-israel-de-la-marginalisation-de-l-olp_6338346_6116995.html

58« Le 6 décembre 1987 , un Israélien est poignardé. Le 8 décembre 1987, un camion israélien rentre dans une voiture palestinienne tuant les quatre passagers palestiniens au checkpoint d’Erez. La radio diffuse la nouvelle sans insister car il s’agit d’un accident. Une rumeur fait surface selon laquelle il s’agit d’un acte de vengeance commis par un parent de l’Israélien poignardé deux jours plus tôt. » « Première intifada », Wikipedia https://fr.wikipedia.org/wiki/Premi%C3%A8re_intifada#R%C3%A9pression_militaire_isra%C3%A9lienne

59Le Hamas publiera une nouvelle Charte en 2017 qui renoue avec certains aspects de la charte de l’OLP qui insiste sur le caractère plus politique que religieux du conflit.

60Pierre-Alain Clément, Note de recherches sur le Hamas, UQUAM, 2009 : https://dandurand.uqam.ca/wp-content/uploads/2016/04/fiche_hamas_pa_clement.pdf

61Pierre-Alain Clément, Note de recherches sur le Hamas, UQUAM, 2009 : https://dandurand.uqam.ca/wp-content/uploads/2016/04/fiche_hamas_pa_clement.pdf

62Alain Frachon, « L’assassinat de Yitzhak Rabin, un crime politique parfait », Le Monde, 25 août 2015 : https://www.lemonde.fr/festival/article/2015/09/09/l-assassinat-de-yitzhak-rabin-un-crime-politique-parfait_4750026_4415198.html

63Tal Schneider, « Pendant des années, Netanyahu a soutenu le Hamas. Aujourd’hui, on en paie le prix », The Times of Israël, 8 octobre 2023 : https://fr.timesofisrael.com/pendant-des-annees-netanyahu-a-soutenu-le-hamas-aujourdhui-on-en-paie-le-prix/

64Henry Laurens, La question de Palestine, tome 1, Fayard, 2002,  pp. 176

65Revue Shéïfotainou, I, 1927, p. 28-39, in Shlomo Sand, Deux peuples pour un État, p. 82

66Traduit de l’allemand par Hagit Lavsky, « Nationalisme, de la théorie à la pratique : Hans Kohn et le sionisme » (en hébreu), Sion, B, 2001, p. 196. in Shlomo Sand, Deux peuples pour un État, p. 81

67Cité dans le livre de Hagit Lavsky, Before Catastrophe : The Distinctive Path of German Zionism, Detroit, Wayne State University Press, 1996, in Shlomo Sand, Deux peuples pour un État, p. 84.

68Il est plutôt question ici du « nouveau Yishouv », c’est-à-dire l’ensemble des populations juives arrivées en Palestine dans les années 1880. À distinguer du « vieux Yishouv » qui concerne les populations juives présentes avant la Palestine mandataire.

69In Shlomo Sand, Deux peuples pour un État, p. 88.

70Hannah Arendt, extrait d’Écrits juifs, in L’antisionisme : une histoire juive, p. 131.

71Béatrice Orès et Michèle Sibony, L’antisionisme. Une histoire juive, Syllepses éditions, 2023, 368 p.

72Yakov M. Rabkin, « L’opposition juive au sionisme », Revue internationale et stratégique, 2004, 56(4), 17-23. https://doi.org/10.3917/ris.056.0017.

73In Shlomo Sand, Deux peuples pour un État, relire l’histoire du sionisme, Seuil, version numérique.

74Ibid.

75Ilan Greilsammer, « Sur l’antisionisme et l’antisémitisme dans la France d’aujourd’hui ». Dans J. Allouche Benayoun, C. Attias-Donfut, G. Jikeli et P. Zawadzki L’antisémitisme contemporain en France : Rémanences ou émergences ?, éditions Hermann, 2022, p. 249-274. https://doi.org/10.3917/herm.allou.2022.01.0249.

76Béatrice Orès et Michèle Sibony, L’antisionisme. Une histoire juive, Syllepses éditions, 2023, 368 p.

77Ibid. p. 222.

78Yakov M. Rabkin, L’opposition juive au sionisme. Revue internationale et stratégique, 2004, 56(4), pp. 17-23. https://doi.org/10.3917/ris.056.0017. .

79Thomas Römer, L’invention de Dieu, éditions Seuil, 2014, version numérique, 352 p.

80Ibid.

81Ibid.

82Ibid

83Ibid.

84Ibid.

85Ibid.

86Ibid.

87Ibid.

88Ibid.

89« Émancipation des juifs », Wikipedia : https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89mancipation_des_Juifs

90« Haskala », Wikipedia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Haskala

91Ilan Greilsammer, « Réflexions sur l’identité israélienne aujourd’hui », Cités, 2007, 29(1), pp. 39-48. https://doi.org/10.3917/cite.029.0039.

92Ilan Greilsammer, Religion et État en Israël, Publications de l’École Pratique des Hautes Études, 2013.https://doi-org.gorgone.univ-toulouse.fr/10.4000/books.ephe.2130.

93Ibid.

94Hannah Arendt, « On Hannah Arendt », in Melvyn A. Hill (éd.), Hannah Arendt: The Recovery of the Public World, New York, St. Martin’s Press, 1979, p. 334. Cet article est issu d’une communication au colloque « L’antisionisme au 20e siècle », organisé à Berlin les 2 et 3 juillet 2004 par Fabrice d’Almeida, Jean-Marc Dreyfus et Jacques Ehrenfreund. On notera que l’argumentaire de ce colloque proposait cette définition de l’anti-sionisme : « Une opposition à l’existence d’un État souverain démocratique pour les Juifs ».

95Raul Hilberg, La Destruction des Juifs d’Europe, Fayard, 2024, 1100 p.

96Mémorial de la Shoah, « Questions fréquentes » : https://www.memorialdelashoah.org/archives-et-documentation/quest-ce-que-la-shoah/questions-frequentes.html

97Swaminathan Natarajan, « L’Holocauste : Les victimes roms oubliées se battent pour garder la mémoire », BBC News Afrique, 25 janvier 2023 : https://www.bbc.com/afrique/monde-64391702

98Discrimination et persécutions, Romasintigenocide.eu : https://romasintigenocide.eu/fr/b

99Ibid.

100Ilan Greilsammer, Religion et État en Israël, Publications de l’École Pratique des Hautes Études, 2013.https://doi-org.gorgone.univ-toulouse.fr/10.4000/books.ephe.2130.

101Ilan Greilsammer, « Réflexions sur l’identité israélienne aujourd’hui », Cités, 2007, 29(1), pp. 39-48. https://doi.org/10.3917/cite.029.0039.

102Dieckhoff, Alain, et Riva Kastoryano, dir. Nationalismes en mutation en Méditerranée orientale. CNRS Éditions, 2002, https://doi.org/10.4000/books.editionscnrs.2373.

103Nadia Malinovich, « Le judaïsme libéral en Europe et aux États-Unis Une mise au point historiographique », Archives Juives, 2007, 40(2), 9-22. https://doi.org/10.3917/aj.402.0009.

104Jeremy Sharon, « Cour suprême : Israël doit reconnaître les mariages en ligne célébrés dans l’Utah », The Times of Israël, 8 mars 2023 : https://fr.timesofisrael.com/cour-supreme-israel-doit-reconnaitre-les-mariages-en-ligne-celebres-dans-lutah/

105Citoyenneté israélienne, Word Repatriation Agency Israël : https://welcome-israel.com/fr/citoyennete-israelienne#qui-peut-demander-la-citoyennet-israeli

106Test ADN juif, Word Repatriation Agency Israël : https://welcome-israel.com/fr/test-adn-juif ;

Marissa Newman, « Les tests ADN de judéïté exigés par le rabbinat deviennent une pomme de discorde », The Times of Israël, 23 octobre 2019Marissa Newman, « Les tests ADN de judéïté exigés par le rabbinat deviennent une pomme de discorde », The Times of Israël, 23 octobre 2019 : https://fr.timesofisrael.com/les-tests-adn-de-judeite-exiges-par-le-rabbinat-deviennent-une-pomme-de-discorde/

107Isabelle Mandraud, « En Israël, une émigration sans précédent : ‘‘Si rien ne change aux prochaines élections, il y aura encore plus de monde pour partir’’ », Le Monde, 28 janvier 2025 : https://www.lemonde.fr/international/article/2025/01/28/en-israel-un-exil-a-bas-bruit-j-aime-mon-pays-mais-ce-qui-nous-attend-ce-sont-des-annees-noires_6519923_3210.html

108Ilan Greilsammer, « Réflexions sur l’identité israélienne aujourd’hui », Cités, 2007, 29(1), pp. 39-48. https://doi.org/10.3917/cite.029.0039.

109André CAQUOT, « Sémites », Encyclopédie Universalis, https://www.universalis.fr/encyclopedie/semites/

110Jeune Afrique, « Qui sont les sémites ? », 27 avril 2004 : https://www.jeuneafrique.com/70388/archives-thematique/qui-sont-les-s-mites/

111Abraham Sarks, « Sémites ou non sémites ?… », Le Monde, 7 février 1968 : https://www.lemonde.fr/archives/article/1968/02/07/semites-ou-non-semites_2479191_1819218.html

112Dieckhoff, Alain, et Riva Kastoryano, dir., Nationalismes en mutation en Méditerranée orientale, CNRS Éditions, 2002, https://doi.org/10.4000/books.editionscnrs.2373.

113Thomas Vescovi et Dominique Vidal, « Arabes israéliens, les discriminations au service de l’apartheid », Association France Palestine Solidarité, 2024 https://www.france-palestine.org/Arabes-israeliens-les-discriminations-au-service-de-l-apartheid

114Dieckhoff, Alain, et Riva Kastoryano, dir., Nationalismes en mutation en Méditerranée orientale, CNRS Éditions, 2002, https://doi.org/10.4000/books.editionscnrs.2373.

115Joseph Algazy, « Du plan de partage de 1947 au plan “Allon plus” de 1997 – En Israël aussi », Le Monde diplomatique, septembre 1997

116Catherine Weibel, « Squatters sur leurs propres terres : les tribus bédouines du Néguev » sur Oxfam.org, 17 février 2010.

117Édouard Conte, « L’autre mur », Études rurales, 173-174, 2005, pp. 127-152. https://journals.openedition.org/etudesrurales/8135

118Geneva Graduate Institut, « La nouvelle loi israélienne est contraire au droit international », 14 août 2018 https://www.graduateinstitute.ch/fr/news-events/news/la-nouvelle-loi-israelienne-est-contraire-au-droit-international

119Times of Israel Staff, À la veille des audiences à la CIJ, un élu Likud réitère son appel à « brûler Gaza », The Times of Israël, 10 janvier 2024 : https://fr.timesofisrael.com/a-la-veille-des-audiences-a-la-cij-un-elu-likud-reitere-son-appel-a-bruler-gaza/

120Times of Israel Staff, « Les appels d’un élu à « brûler Gaza » n’ont pas enfreint les règles d’éthique – commission », The Times of Israël, 26 mai 2025 : https://fr.timesofisrael.com/les-appels-dun-elu-a-bruler-gaza-nont-pas-enfreint-les-regles-dethique-commission/

121« Amichay Eliyahu : bombarder Gaza est une option, la population devrait ‘‘aller en Irlande ou dans les déserts’’ », The Times of Israël, 5 novembre 2023 : https://fr.timesofisrael.com/liveblog_entry/amichay-eliyahu-bombarder-gaza-est-une-option-la-population-devrait-aller-en-irlande-ou-dans-les-deserts/

122Sam Sokol et Times of Israel Staff, « Ofer Cassif suspendu de la Knesset pour deux mois pour avoir critiqué la guerre », The Times of Israël, 19 juillet 2025 : https://fr.timesofisrael.com/une-commission-de-la-knesset-suspend-pour-2-ofer-cassif-pour-avoir-critique-la-guerre/

123Ilan Greilsammer, « Sur l’antisionisme et l’antisémitisme dans la France d’aujourd’hui ». Dans J. Allouche Benayoun, C. Attias-Donfut, G. Jikeli et P. Zawadzki L’antisémitisme contemporain en France : Rémanences ou émergences ?, éditions Hermann, 2022, p. 249-274. https://doi.org/10.3917/herm.allou.2022.01.0249.

124https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/04/24/gunther-jikeli-l-antisemitisme-parmi-les-musulmans-se-manifeste-au-dela-des-islamistes-radicaux_5289764_3232.html

125Béatrice Orès, Michèle Sibony, Sonia Fayman, Antisionisme, une histoire juive, éditions Syllepse, 2023,

126Cour Pénale Internationale, Statut de Rome : https://www.icc-cpi.int/sites/default/files/Publications/Statut-de-Rome.pdf

127Ehoud Olmert, « Israël commet bien des crimes de guerre à Gaza », tribune Le Monde, 6 juin 2025 : https://www.lemonde.fr/idees/article/2025/06/04/ehoud-olmert-israel-commet-bien-des-crimes-de-guerre-a-gaza_6610422_3232.html ; Julia Pascual, « Une Gazaouie obtient le statut de réfugiée en France en raison des « persécutions » de l’armée israélienne à l’encontre des Palestiniens », Le Monde, 12 juillet 2025 : https://www.lemonde.fr/guerre-au-proche-orient/article/2025/07/11/une-gazaouie-obtient-le-statut-de-refugiee-en-raison-des-persecutions-de-l-armee-israelienne-a-l-encontre-des-palestiniens_6620734_6325529.html

128Christophe Ayad, « ‘‘Génocide à Gaza’’ : pourquoi la question divise les juristes », Le Monde, 15 juillet 2025 https://www.lemonde.fr/idees/article/2025/07/12/israel-a-t-il-commis-un-genocide-dans-la-bande-de-gaza_6620761_3232.html

129Monique Chemillier-Gendreau, Rendre impossible un État palestinien, éditions Textuels, 2025, 160 p.

130AFP et Le Monde, « Le Hamas dit accepter un Etat palestinien dans les frontières de 1967 », Le Monde, 2 mai 2017 : https://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2017/05/01/le-hamas-dit-accepter-un-etat-palestinien-limite-aux-frontieres-de-1967_5120620_3218.html

131Clara Hidalgo, « Avant Trump, Netanyahou avait déjà présenté un plan «Gaza 2035» pour transformer le territoire palestinien en Dubaï 2.0 », Le Figaro, 7 février 2025 : https://www.lefigaro.fr/international/avant-trump-netanyahou-avait-deja-presente-un-plan-gaza-2035-pour-transformer-le-territoire-palestinien-en-dubai-2-0-20250207

132France Info, « “Ville humanitaire”, déplacements de population, émigration… Ce que l’on sait du plan du gouvernement israélien pour la bande de Gaza », 8 juillet 2025 : https://www.franceinfo.fr/monde/palestine/gaza/ville-humanitaire-deplacements-de-population-emigration-ce-que-l-on-sait-du-plan-du-gouvernement-israelien-pour-la-bande-de-gaza_7364373.html#comments-embed

133Le Fatah, mouvement laïc, représente le mouvement le plus important au sein de l’OLP.